France

Les faits antisémites ont-ils vraiment augmenté au cours des dernières années ?

Chaque année, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) publie un rapport sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. Un travail particulièrement documenté, rédigé grâce aux contributions de nombreux acteurs, notamment les ministères de l’Intérieur et de la Justice. Et concernant les faits antisémites, pas de doute, les chiffres ont littéralement explosé depuis 2023. En prenant du recul sur dix ans, si ces mêmes statistiques démontrent l’existence d’un fond d’antisémitisme rampant, elles ne prouvent en rien que ces faits augmentent de façon exponentielle.

Le recensement des actes à caractère antisémite, antimusulman, antichrétien et raciste est assuré par le service central du renseignement territorial (SCRT), aujourd’hui DNRT. Il s’agit d’actes qui ont donné lieu à un dépôt de plainte ou à une intervention de police. Et c’est dans son bilan pour l’année 2023 que le service a constaté « une très forte hausse » des actes antisémites qu’il attribue au « conflit israélo-palestinien ».

Une évolution des chiffres en dents de scie

Une hausse non pas de 1.000 % comme l’affirmait une pancarte lors d’une manifestation contre l’antisémitisme, en juin 2024, mais de + 284 %, passant de 436 faits recensés en 2022 à 1.676 faits en 2023. Un pic énorme, sans précédent, qui a toutefois marqué le pas l’année suivante, en 2024, pour s’établir à 1.570 faits antisémites recensés.

Si l’on regarde en arrière, les bilans annuels des services de renseignement montrent plutôt une évolution des chiffres en dents de scie, avec des pics très marqués, aussitôt suivis de baisses tout aussi marquées ou presque. Ainsi, l’année 2002 a connu un pic de 936 actes antisémites qui s’est établi en 2003 à 601. Autre pic avec 974 actes en 2004, redescendu à 508 en 2005. Un schéma qui s’est répété en 2009, 2014 et, de manière beaucoup plus marquée, en 2023.

Les « racistes et xénophobes » en hausse

Pour autant, la courbe établie par la CNCDH depuis 2001 ne montre pas une tendance à la hausse de la moyenne des actes antisémites. En 2017 par exemple, il y a eu près de deux fois moins d’actes antisémites recensés (311 faits) qu’en 2003 (601 faits) alors que cette dernière année ne constituait pas un pic. Ce que l’on peut en revanche noter, c’est que le nombre d’actes antisémites n’est jamais redescendu au-dessous de la barre des 200, dépassée chaque année depuis l’an 2000.

Notre dossier sur l’antisémitisme

Si l’on ne va pas faire un classement des communautés les plus stigmatisées, il est toutefois intéressant de regarder les autres chiffres des renseignements territoriaux. Sur les actes anti musulmans, la CNCDH regrette que les statistiques ne soient pas pertinentes, puisque avant 2024, « aucune association en lien avec les pouvoirs publics n’était en mesure d’en assurer le décompte ». Pour ce que la DNRT classe comme faits « racistes et xénophobes », hors faits antisémites et anti musulmans, on remarque cette fois une augmentation continue depuis 1999, passant de 120 faits recensés cette année-là, à 1.401 faits pour l’année 2024.