Etats-Unis : C’est quoi le « swatting », cette blague vraiment pas drôle qui se multiplie dans les universités ?

Les scènes se ressemblent : des étudiants en panique, les forces de l’ordre qui débarquent en force sur le campus… pour une fausse alerte. C’est ce qu’on appelle le « swatting », un phénomène apparu il y a quelques années aux Etats-Unis et qui se multiplie en cette rentrée dans les universités américaines.
Le terme, qui découle de « Swat », l’unité d’intervention de la police américaine. Le swatting consiste à appeler les services d’urgence pour signaler une menace ou un crime grave, comme une fusillade par exemple. La police intervient rapidement et avec force, pour rien, ce qui constitue le cœur de la blague.
Dimanche, à l’université de Caroline du Sud, deux appels ont signalé à tort dimanche des coups de feu. Deux étudiants ont été légèrement blessés en se précipitant hors de la bibliothèque, évacuée à la suite d’un appel. Un troisième a été faussement accusé d’être le tireur après le partage d’images sur les réseaux sociaux le montrant avec un parapluie, ressemblant à une arme à feu.
Des informations tout aussi infondées ont touché l’université Villanova, en Pennsylvanie, et l’université du Tennessee-Chattanooga la semaine dernière. Au moins sept autres établissements ont été visés lundi ainsi que l’université de Virginie-Occidentale mardi, selon des déclarations des établissements et de la police.
Trauma et désensibilisation
Pourquoi ce n’est pas drôle ? C’est d’abord une source de traumatisme pour les étudiants, dans un pays où les fusillades sont fréquentes. Et cela risque aussi de les désensibiliser aux alertes. « Cela joue avec nos nerfs, car de tels événements tragiques se produisent réellement » par ailleurs, explique John DeCarlo, professeur de droit pénal à l’université de New Haven. « Un seul appel peut déclencher des confinements, des mobilisations, des fermetures de bâtiments et une importante couverture médiatique », ajoute-t-il.
Cette pratique « épuise les ressources des forces de l’ordre, coûte des milliers de dollars et, surtout, met en danger des personnes innocentes », souligne également le FBI, police fédérale américaine, qui constate une augmentation des cas à travers le pays. Depuis la création d’une base de données dédiée en 2023, l’agence a déclaré avoir reçu des milliers de signalements.
Les universités sont « particulièrement vulnérables » au swatting en raison de leur visibilité, souligne John DeCarlo. D’autant que plusieurs d’entre elles, dont Harvard, Columbia et l’Université de Californie, ont été ciblées par Donald Trump ces derniers mois, qui les a accusées de wokisme ou de soutien à la cause palestinienne.
Groupes extrémistes
Qui sont ces mauvais humoristes ? Selon Keven Hendricks, expert en cybercriminalité, les auteurs de ces appels sont souvent liés à des groupes et à des idéologies extrémistes, et parfois mineurs.
Retrouvez ici tous nos articles sur l’actualité des Etats-Unis
Des experts ont appelé à un renforcement de la législation et à investir dans des technologies permettant d’identifier les auteurs qui dissimulent leur voix ou leur adresse IP. « En réalité, il s’agit d’une forme de terrorisme intérieur », facilité par le fait que « nous n’avons pas les moyens de mener des enquêtes ni des poursuites efficaces », regrette John DeCarlo.

