Belgique

Guerre Israël-Hamas : des universités belges échouent à permettre à ces scientifiques gazaouïs de continuer leur recherches

Les universités de Liège et de Bruxelles éprouvent des difficultés à faire venir en Belgique des chercheurs depuis la bande de Gaza, malgré l’obtention d’un visa pour que les intéressés poursuivent leurs recherches dans le Plat pays. Des universités flamandes sont confrontées à la même situation.

ULB-Palestine
Guerre Israël-Hamas : des universités belges échouent à permettre à ces scientifiques gazaouïs de continuer leur recherches

À l’ULiège, l’on désespère de réussir à faire venir en Belgique un chercheur gazaoui, spécialiste de l’intelligence artificielle et de la linguistique, qui a pourtant obtenu un visa dans le cadre des « Universités hospitalières ». Ce programme vient en aide à des académiques fuyant leur pays en guerre ou dans lequel leur vie est menacée. « Nous avons débloqué un financement pour qu’il poursuive ses recherches à Liège pendant deux ans mais sa sortie de Gaza est presque impossible. On se demande même s’il survivra jusqu’à ce qu’il puisse venir en Belgique », s’inquiète Michel Moutschen, vice-recteur à la Recherche.

« Le visa n’est pas un problème mais nous avons besoin d’un support diplomatique pour l’extraire » de la bande de Gaza, alors que les troupes israéliennes ont lancé leurs premières opérations sur la ville de Gaza, souligne Pierre Duysinx, vice-recteur aux Relations internationales.

L’Université de Liège en appelle dès lors aux autorités belges, Les deux vice-recteurs renvoient vers la France, qui a mis en place le programme PAUSE (Programme d’accueil en urgence des scientifiques et artistes en exil), permettant d’extraire des scientifiques de la bande de Gaza. « Si la France a réussi, les Belges devraient y arriver également », espèrent MM. Moutschen et Duysinx.

Les deux vice-recteurs liégeois regrettent surtout la position des autorités belges sur la question. « On nous a rétorqué que les autorités ne voulaient pas s’impliquer (…), que la Belgique n’utiliserait les voies exceptionnelles (pour extraire des personnes de Gaza, NDLR) que pour les réssortissants belges ou les personnes qui ont un statut de réfugié, ce qui ne peut être obtenu qu’à Bruxelles », s’insurgent-ils.

« Notre sentiment, c’est que nous avons la possibilité, en tant qu’universités et autorités, de permettre à des intellectuels de survivre à cette catastrophe et nous ratons cette opportunité », fustigent MM. Moutschen et Duysinx.

Fin juillet, la rectrice de l’ULB Annemie Schaus relatait une situation similaire sur les réseaux sociaux. « C’est avec une profonde inquiétude que l’ULB dénonce l’impossibilité pour le chercheur palestinien Ahmed Alsalibi, son épouse et son fils de 11 ans de rejoindre notre institution, malgré l’obtention d’une bourse de post-doctorat, d’un visa et d’un permis de travail », écrivait-elle sur Facebook. « Les autorités nous ont fait savoir qu’elles ne pourraient pas assurer son évacuation, au motif que notre collègue ne dispose pas de lien suffisamment direct avec la Belgique », s’offusquait-elle, alors que le chercheur devait être accueilli par le fonds de solidarité de l’université destiné aux chercheurs en danger.

L’UCLouvain de son côté ne compte pas d’étudiants ou de chercheurs gazaouis. L’université comptait au semestre dernier parmi sa cohorte deux étudiants palestiniens, qui venaient de Cisjordanie, de sorte qu’ils n’ont pas été confrontés aux mêmes difficultés, souligne une porte-parole. Cette initiative sera reconduite. « Nous avons aussi beaucoup de demandes d’étudiants qui ont réussi à rejoindre l’Égypte », poursuit la porte-parole. Dans leur cas, c’est plutôt la question du financement qui se pose. « Des négociations sont en cours avec la Région wallonne » pour régler ce problème.

En Flandre, les universités sont confrontées aux mêmes difficultés. Ainsi, une étudiante ayant obtenu une bourse auprès du programme Daughters for Life de la KU Leuven n’a pu rejoindre la Belgique, indique un porte-parole. « Ses papiers sont en ordre mais elle ne peut se rendre à l’ambassade belge à Jérusalem pour finaliser sa demande », poursuit-il. En raison du siège israélien de Gaza, il est impossible pour la population de rallier l’ambassade.

À la VUB, un étudiant et un postdoctorant originaires de Gaza ont obtenu une bourse auprès de l’université bruxelloise néerlandophone. « L’un se trouve en Egypte, l’autre au Yémen. Mais ils ne peuvent pas obtenir le visa nécessaire à Jérusalem. Et il n’y a pas d’ambassade belge au Yémen. »

L’Université d’Anvers ne compte pour sa part aucun personnel académique dans ou en provenance de la bande de Gaza.

Fin juillet, l’ULB avait adressé un courrier au ministre des Affaires étrangères, Maxime Prévot, lui demandant de revoir les critères d’évacuation de la bande de Gaza. Ce dernier avait répondu qu’il considérait comme une priorité d’évacuer le maximum de personnes. Néanmoins, il affirmait que le gouvernement n’a, actuellement, « pas la possibilité d’élargir le scope des évacuations, peinant déjà dans les conditions de guerre actuelles, à rendre opérationnelles les évacuations identifiées à ce jour pour les ressortissants belges et réfugiés reconnus ».

Le ministre Prévot justifiait la limitation de l’intervention des autorités par une « concentration des efforts » au vu de la situation sur le terrain.