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Ariège : Le procès du chasseur qui a tué l’ourse Caramelle dans les Pyrénées débute ce mardi

C’est une affaire qui cristallise les tensions entre défenseurs de l’ours et partisans d’une chasse sans entrave en Ariège. Ce mardi s’ouvre au tribunal correctionnel de Foix le procès d’André Rives, 81 ans, poursuivi pour « destruction d’espèce protégée » après avoir abattu une ourse en novembre 2021. Lors d’une battue au sanglier, le chasseur s’est retrouvé face à face avec l’animal qui l’a attaqué avant qu’il ne riposte, la tuant de deux coups de fusil. Mais les faits se sont déroulés dans une zone interdite à la chasse, la Réserve domaniale du Mont-Valier, selon l’accusation.

Quinze autres chasseurs présents ce jour-là comparaissent également pour diverses infractions au droit de la chasse. Une vingtaine d’associations, dont Pays de l’ours, Ferus et France Nature Environnement, se sont constituées parties civiles, déterminées à faire respecter la protection de l’ours dans les Pyrénées.

« Il faut comprendre comment on en est arrivé là »

Pour Alain Reynes, de l’association Pays de l’ours, ce procès est essentiel pour éviter qu’un tel drame ne se reproduise. « Il faut comprendre ce qui s’est passé ce jour-là, établir la chaîne des responsabilités », explique-t-il. Il rappelle que les interactions entre chasseurs et ours sont rares mais possibles, et que la cohabitation doit être mieux encadrée.

L’affaire intervient dans un climat particulièrement tendu en Ariège, où la présence de l’ours alimente les conflits. Le département abrite la majorité des 86 plantigrades recensés dans le massif pyrénéen, une situation qui exacerbe les tensions avec les éleveurs de brebis, victimes de prédations sur leurs troupeaux en estive.

Un chasseur en état de légitime défense ?

Dans les rangs des chasseurs, la mort de l’ourse est regrettée, mais certains estiment que la situation aurait pu être encore plus dramatique. « Il s’est retrouvé entre la mère et ses oursons, elle a failli le tuer. Il était grièvement blessé, en état de légitime défense. Il ne faut pas l’accabler », témoigne anonymement l’un des prévenus.

L’accusé, blessé aux jambes et hospitalisé après l’attaque, avait été évacué par hélicoptère. Le président de la Fédération de chasse de l’Ariège, Jean-Luc Fernandez, défend quant à lui la présence des chasseurs sur les lieux, assurant que la pratique était tolérée de longue date. « Nous chassions là depuis des années, les autorités le savaient et n’ont jamais rien trouvé à redire », affirme-t-il.

Un coup dur pour la survie de l’ours

Pour les défenseurs de la faune sauvage, l’affaire dépasse le simple cadre judiciaire. « Une femelle reproductrice en moins, c’est grave et préjudiciable pour la survie de l’espèce », souligne Me Julie Rover, avocate de douze associations parties civiles. Malgré une progression de la population d’ours dans les Pyrénées, celle-ci reste fragile et non viable sans renforcement, rappellent les écologistes, qui réclament de nouveaux lâchers pour compenser les pertes causées par l’homme.

Notre dossier sur la chasse

Les associations demandent à l’Etat de respecter son engagement en remplaçant chaque animal disparu. « La disparition de cette ourse doit être réparée », insiste Alain Reynes. Le procès, qui se tiendra sur deux jours, s’annonce crucial pour l’avenir de la cohabitation entre chasseurs et ours dans les Pyrénées. Le verdict sera particulièrement scruté, tant par les défenseurs de la faune sauvage que par les acteurs du monde cynégétique.