Négociations bruxelloises : l’Open VLD bloque la proposition de coalition sans la N-VA des informateurs, tandis que le MR fait monter les enchères
Christophe De Beukelaer (Les Engagés) a conclu sans le dire ce lundi à l’échec de sa mission. « Notre mission d’information est terminée », a-t-il indiqué. « Il n’y a pas encore de consensus sur la prochaine phase. Dès lors les sept partis ont décidé de se retrouver mercredi à 12 heures pour décider de la suite. »
- Publié le 17-03-2025 à 20h48
- Mis à jour le 17-03-2025 à 22h10
©DLE
C’est une pièce de théâtre dont seuls les acteurs principaux comprennent encore la trame et qui semble n’intéresser que ses metteurs en scène.
Chaque épisode est d’assez mauvaise qualité mais aussi très prévisible, puisqu’il se termine invariablement mal.
Dans les négociations bruxelloises, David Leisterh (MR) incarne le jeune premier ambitieux, mais un peu dépassé par les événements. Ahmed Laaouej (PS) a endossé jusqu’il y a peu le rôle du méchant, faisant capoter l’accord en refusant de gouverner avec la N-VA, et est parvenu à transmettre ce rôle à Frédéric De Gucht, chef de file de l’Open VLD, qui refuse de gouverner sans la N-VA.
Le changement ne change pas grand-chose : la Région Bruxelles Capitale reste bloquée de la même manière, 9 mois après les élections.
Lors du dernier épisode en date, les informateurs bruxellois ont tenté un coup de poker.
Christophe De Beukelaer (Les Engagés) et Elke Van den Brandt (Groen) ont tenté de forcer la main des libéraux en proposant un gouvernement bruxellois à sept partis, sans la N-VA. Ces sept partis (MR, PS, Les Engagés, Groen, Open VLD, Vooruit, CD & V) ont été conviés à une réunion, ce lundi à 15 heures au Parlement bruxellois. Cette piste de coalition est la seule à garantir « la mise en place rapidement d’un gouvernement stable« , ont assuré les informateurs.
« Les informateurs pensent que tous les partis doivent mettre de l’eau dans leur vin, sauf… le PS« , a répliqué Cieltje Van Achter, cheffe de file de la N-VA à Bruxelles.
Bouchez propose à Laaouej de prendre la main
Les sept partis ont toutefois répondu présent. Pour mettre fin, enfin, au blocage ? Que nenni. L’option d’une prolongation de la mission a été proposée. Refus des informateurs. « Ils auraient dû garder la main. On n’avait jamais été aussi proches d’aboutir. C’est une erreur« , pointe une source libérale.
La proposition, validée par cinq partis (PS, Les Engagés, Groen, Vooruit, CD & V), de rendre la main à David Leisterh (MR) comme formateur a ensuite été discutée. Refus de Georges-Louis Bouchez. Le président du MR a assuré ne pas avoir d’exclusive contre le CD & V, mais a réclamé des garanties sur le fond, proposant de confier une mission de préformation en duo à Benjamin Dalle (CD & V), qui a décliné, et à Ahmed Laaouej (PS), qui ne s’est pas encore positionné. Le MR a évoqué « un prix à payer » en échange de son lâchage de la N-VA, avec qui il gouverne au Fédéral. « On peut faire tourner encore le carrousel une fois, mais ça n’amènera pas d’autres solutions que celles que les informateurs ont proposées, et que je fais mienne« , a réagi Ahmed Laaouej à la sortie de la réunion.
Reste que ce lundi, en début de soirée, Christophe De Beukelaer a conclu sans le dire à l’échec de sa mission. « Notre mission d’information est terminée, a-t-il indiqué. Il n’y a pas encore de consensus sur la prochaine phase. Dès lors les sept partis ont décidé de se retrouver mercredi à 12 heures pour décider de la suite. »
Les deux principales options restantes sont connues : faire céder Ahmed Laaouej, ce qui a échoué depuis 5 mois, ou faire plier Frédéric De Gucht.
L’Open VLD refuse en effet d’entamer les négociations bruxelloises sans la N-VA : « Nous ne monterons que dans un gouvernement qui amène une solution pour Bruxelles. Et on a pour ça besoin du niveau fédéral, et de tous les gouvernements de ce pays. Or, en Flandre et au Fédéral, c’est la N-VA qui tient la main« , avait indiqué Frédéric De Gucht, président de l’Open VLD en Région bruxelloise, à La Libre avant la réunion.
Frédéric De Gucht soutenu par Alexia Bertrand et son parti
Frédéric De Gucht (43 ans) est souvent présenté comme un électron libre par ses adversaires politiques. L’homme l’a dit et répété : il ne souhaite pas devenir ministre bruxellois, préférant continuer de mener sa carrière politique de front avec son activité d’entrepreneur (NdlR : il dirige Sprimoglass, une société de transformation de verre, basée à Sprimont). Certains, au sein même du parti, lui prêtent toutefois de grandes ambitions politiques. Il n’a pas été candidat à la présidence nationale de l’Open VLD pour rien.
Il est moins sensible à la pression que d’autres politiques : le Bruxellois n’a pas été élu, en dehors de son mandat à l’Open VLD, et claironne qu’il ne fera pas de la politique toute sa vie.
Quoi qu’il en soit, la position du fils de Karel De Gucht (ancien président de l’Open VLD et ex-ministre des Affaires étrangères), est largement soutenue en interne, notamment par l’ancien ministre bruxellois Guy Vanhengel et la députée fédérale Alexia Bertrand.
« Nous ne bougeons pas d’un iota. Penser que Bruxelles peut s’en sortir en excluant le premier parti au fédéral c’est un leurre », souligne Alexia Bertrand, cheffe de groupe de l’Open VLD à la Chambre.
Le valet noir pour l’Open VLD, l’ambiguïté du MR
La position du MR, qui a maintenu le silence radio sur le sujet depuis vendredi, n’est pas aussi claire.
Le blocage de Frédéric De Gucht, qui pourrait ainsi reprendre le rôle peu enviable de « valet noir », permet à David Leisterh et Georges-Louis Bouchez de maintenir une ambiguïté dont, comme le disait le cardinal de Retz, on ne sort qu’à son détriment. Le MR, c’est une évidence, aurait préféré une majorité bruxelloise incluant la N-VA. Mais le parti de Georges-Louis Bouchez, qui entend faire monter les enchères pour monnayer un éventuel lâchage des nationalistes flamands, semble moins résolu que l’Open VLD. Certains libéraux flamands, balayés aux dernières élections régionales et fédérales, inscrivent cette posture ferme dans le cadre d’une reconquête électorale, qui voit l’Open VLD se profiler comme le parti défendant la rigueur budgétaire et l’intérêt flamand face à un PS bruxellois qui a très mauvaise presse au nord du pays. « Mais la vraie question, au-delà de tous ses arguments, c’est pourquoi Frédéric De Gucht est scotché à ce point à la N-VA à Bruxelles, alors qu’ils les attaquent à la Chambre », se demande un socialiste.