Maroc

Al-Madrassa al-Jadida : réinventer l’école pour restaurer la confiance et relever les défis de demain

Le Conseil Supérieur de l’Éducation, de la Formation et de la Recherche Scientifique (CSEFRS) vient de publier un rapport intitulé « Al-Madrassa al-Jadida : un nouveau contrat social pour l’éducation ». Ce document ambitieux met en lumière l’urgence de repenser en profondeur le système éducatif marocain pour l’adapter aux défis du XXIe siècle. Il propose une approche systémique visant à moderniser l’école, renforcer la gouvernance et préparer les nouvelles générations à un monde en mutation.

Un monde en mutation, une école à moderniser

L’éducation marocaine se trouve à un tournant décisif. Face à un monde en constante évolution – révolution numérique, transition écologique, transformation du marché du travail – l’école doit cesser d’être un simple lieu de transmission du savoir pour devenir un espace dynamique de formation et d’innovation. Le rapport du CSEFRS insiste sur la nécessité d’un modèle pédagogique agile, qui rompe avec les méthodes classiques et prépare les élèves à des emplois et des défis encore inconnus. Il appelle également à une adaptation des curricula pour répondre aux besoins économiques du pays, en intégrant des compétences transversales et des savoirs pratiques.

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Des ambitions confrontées aux réalités

La Vision stratégique 2015-2030 avait amorcé cette transformation en posant les bases d’une école fondée sur l’équité, la qualité et l’égalité des chances. Cependant, plusieurs obstacles freinent encore sa mise en œuvre :

  • Un écart persistant entre les grandes orientations et leur application concrète,
  • Une fragmentation des réformes limitant leur impact global,
  • Une gouvernance trop centralisée, limitant l’autonomie des établissements,
  • Une absence de convergence entre les politiques éducatives et les réalités du marché du travail.
  • Le rapport ne se contente pas de pointer ces défis, il propose une feuille de route pour les surmonter.

Sept leviers pour transformer l’éducation

Le CSEFRS identifie sept axes stratégiques pour bâtir l’école de demain. Ces enjeux majeurs liés essentiellement à des problématiques transversales qui, malgré les réalisations des politiques publiques en matière d’enseignement préscolaire et scolaire, d’enseignement supérieur et de formation professionnelle, sont restées en suspens et pour lesquelles la Vision stratégique a proposé des approches novatrices.

  1. Un contrat social éducatif inclusif : Impliquer l’ensemble des acteurs – parents, enseignants, collectivités et entreprises – dans la gouvernance de l’éducation.
  2. Une autonomie renforcée des écoles : Accorder plus de flexibilité aux établissements pour qu’ils puissent s’adapter aux besoins spécifiques de leur territoire et expérimenter des approches pédagogiques innovantes.
  3. Un ancrage local plus fort : L’école doit s’intégrer davantage dans son environnement socio-économique pour répondre aux réalités locales et créer des synergies avec les collectivités territoriales et les entreprises.
  4. Une administration au service du progrès éducatif : Transformer les structures de contrôle en véritables leviers d’accompagnement et d’innovation, basées sur la transparence, la responsabilisation et l’évaluation des performances.
  5. Un modèle pédagogique rénové : Encourager l’apprentissage actif, l’usage du numérique, les pédagogies alternatives et la professionnalisation des enseignants pour garantir un enseignement plus adapté aux enjeux contemporains.
  6. Une meilleure articulation entre les différents niveaux d’enseignement : Éviter le cloisonnement entre l’éducation scolaire, la formation professionnelle et l’enseignement supérieur, en développant des passerelles permettant des parcours flexibles et adaptés.
  7. Une mobilisation durable et une convergence des politiques publiques : La réforme éducative est un chantier de long terme qui exige un engagement constant, une vision claire et une cohérence entre les différentes politiques sectorielles (éducation, emploi, recherche, digitalisation, inclusion sociale).

Comme jamais auparavant, l’École marocaine est interpelée pour qu’elle contribue efficacement à reconstruire la confiance dans l’éducation et à réactiver l’ascenseur social pour un avenir meilleur. « Ce sont près de neuf familles sur dix qui souhaitent que l’École soit en mesure de préparer leurs enfants à un avenir meilleur que le leur », indique le conseil. C’est tout le sens du nouveau contrat social pour l’éducation. Sans une transformation profonde, il sera impossible d’atteindre les objectifs du Maroc en matière de cohésion sociale, d’intégration économique et de développement humain. Le rapport souligne que l’éducation doit être considérée comme un projet de société à part entière, nécessitant une mobilisation collective et un suivi rigoureux des réformes engagées.

A noter que le groupe de travail qui a réalisé ce rapport a été formé et validé en décembre 2023. Il comprend 17 experts, dont Mohammed Amine Sbihi et Amal El Fallah Seghrouchni, et l’accompagnement du SG du CSEFRS, Aziz Kaichouh.