« Le pari de trois dingues »… Et maintenant, la Bretagne se lance dans la production de vanille

Il paraît que tout pousse au Brésil, véritable grenier de la planète. Et bien sachez qu’on pourra bientôt en dire autant de la Bretagne, première région agricole de France. Déjà championne toutes catégories pour la production de tomates, de choux-fleurs, d’échalotes ou d’épinards, la Bretagne commence depuis peu à devenir une région viticole à la faveur d’un changement de réglementation et du réchauffement climatique. Des produits exotiques commencent également à être cultivés sur le sol breton comme des agrumes, des avocats ou de l’aloe vera.
Figurez-vous qu’on y fait même désormais pousser de la vanille. Une idée assez incongrue sur le papier. « C’est le pari de trois dingues », confirme Pierre Guyomar, producteur de tomates à Camlez (Côtes-d’Armor). Avec deux autres maraîchers, également adhérents à la puissante coopérative Prince de Bretagne, l’agriculteur mûrit ce projet un peu fou depuis plus de cinq ans.
Une plante qui n’aime ni la chaleur, ni le froid
Tout remonte à 2019. Cette année-là, les producteurs de tomates ont connu une crise majeure, obligés de détruire des tonnes de marchandises en raison d’un prix trop élevé dans la grande distribution et d’importations trop importantes. « On avait des outils performants mais qui ne servaient plus, il a donc fallu innover », souligne Pierre Guyomar. Un ingénieur agronome de la coopérative leur lance alors le défi de faire pousser sous serre de la vanille, une orchidée principalement produite à Madagascar. « C’est une plante qui n’aime ni la chaleur, ni le froid, ni l’excès d’humidité, précise le maraîcher. On s’est donc dit que la Bretagne pouvait être une terre propice à sa culture sous serre ».
La même année, après un voyage sur l’île de La Réunion, les trois maraîchers bretons ont donc ramené dans leurs valises des plants in vitro de planifolia, la variété de vanille la plus cultivée au monde. Mais faire pousser cette plante tropicale dont le fruit parfume presque tous les desserts ne s’improvise pas. Les trois aventuriers ont ainsi pu compter sur le soutien de producteurs réunionnais qui leur ont appris les techniques de pollinisation, d’échaudage, d’étuvage ou de séchage. « En échange, on les a conseillés sur les meilleures pratiques en matière de plantation sous serre », souligne le maraîcher, qui a dû « apprendre la patience » en se lançant dans la culture de la vanille.
Un stand au Salon de l’Agriculture
Après environ quatre ans d’attente, la vanille bretonne est enfin prête avec un premier millésime de « plusieurs centaines de kilos » qui commence à être commercialisé. Pour le lancement de cette vanille « brune, grasse, riche en vanilline et délicieusement parfumée », les trois producteurs ont pris la direction du Salon de l’Agriculture, à Paris, où ils tiennent un stand pour présenter leur surprenant produit.
« Les gens passent devant nous et nous disent que la vanille et la Bretagne, c’est incompatible, sourit Pierre Guyomar. On est justement là pour leur prouver le contraire ! ».