Violence scolaire : Qui va contrôler les sacs des élèves lors des « contrôles inopinés » annoncés par Elisabeth Borne ?
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Elisabeth Borne siffle la fin de la récré. Dans un contexte de hausse des violences à l’école, avec plusieurs affaires d’agressions ces derniers mois, la ministre de l’Education nationale a annoncé ce matin la mise en place de « fouilles inopinées de sacs ». Ces contrôles devraient commencer « d’ici le printemps, le temps de fixer le cadre avec le ministère de l’Intérieur », précise le ministère à 20 Minutes.
Une annonce qui froisse du côté des enseignants. « On découvre encore une annonce qui va toucher notre quotidien dans les médias », s’agace Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU. « C’est une réponse médiatique à la violence, destinée à l’opinion publique mais totalement déconnectée du terrain », fustige de son côté Morgane Verviers, secrétaire générale de l’UNSA-Education. Effet d’annonce ou pas, comment ces fouilles vont-elles pouvoir s’effectuer ? Suffiront-elles à faire retomber la tension à l’école ?
Sur le plan légal, qui peut faire la fouille ?
Le contrôle actuel des sacs des élèves reste aujourd’hui limité, réduit à « un simple contrôle visuel dans le cadre des mesures Vigipirate », indique le ministère. Pour le reste, « le chef d’établissement ne peut confisquer un objet dangereux que s’il le voit », par exemple lorsqu’un couteau est sorti, précise maître Valérie Piau, avocate spécialiste en droit de l’éducation. Mais il est alors déjà trop tard.
La fouille devra donc légalement être confiée « aux forces de l’ordre », reconnaît le ministère. « C’est assimilable à une perquisition, il faudra une commission rogatoire, agir dans le cadre d’une enquête préliminaire ou en cas de flagrant délit », reprend l’avocate. Le cadre légal de ces fouilles « doit être fixé avec le ministère de l’Intérieur », indique l’entourage d’Elisabeth Borne.
Comment les fouilles vont s’organiser ?
Pour maximiser les chances d’intercepter d’éventuelles armes blanches, les élèves ne seront évidemment pas prévenus des jours où ces contrôles auront lieu. Mais la coordination entre la police et le personnel enseignant sera primordiale. « Si les établissements ne sont pas prévenus, ça peut générer des tensions dans des endroits où un travail complémentaire entre profs et forces de l’ordre porte déjà ses fruits », craint Sophie Vénétitay.
« Les chefs d’établissements seront prévenus en amont », rassure le cabinet de la ministre, expliquant que « l’état-major de sécurité, en associant les recteurs et les directeurs académiques, choisiront les établissements où auront lieu les contrôles ». Cette liste doit permettre de faire tourner ces contrôles ponctuels entre les établissements d’une même zone. Par ailleurs, « le contrôle se fera à l’extérieur de l’établissement aux heures d’entrée, et il n’y aura pas de fouille corporelle », précise le ministère.
Est-ce une vraie solution à la violence à l’école ?
En cas de découverte d’une arme, Elisabeth Borne entend bien serrer la vis. « Il y aura un conseil de discipline systématiquement », prévient le cabinet. Or, retirer le couteau est une chose, mais « il faut s’assurer que derrière l’élève n’aille pas casser la figure à un camarade », pointe aussi Sophie Vénétitay. Pour la syndicaliste, « tout cela est mal pensé » et « ne réglera pas la question du climat de violence à l’école ».
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Mêmes doutes chez Morgane Verviers. « Il y a une réflexion à avoir sur ce qu’on propose comme projet éducatif, sur l’attractivité du métier, les fermetures de classes, les moyens pour la vie scolaire. Mais le tout sécuritaire n’est pas la réponse. » L’impact à moyen terme de ces contrôles ponctuels la laisse dubitative. « Si cela devient une mission régulière des forces de l’ordre, vont-ils avoir des moyens supplémentaires ? » En creux, c’est aussi la régularité de ces contrôles aux abords de certains établissements qui se pose. Car si les élèves ne sont contrôlés qu’une fois par trimestre, la mesure risque d’avoir bien peu d’effets.