Ahmed Laaouej refuse de remplacer David Leisterh comme formateur bruxellois, un nouveau duo entre en piste
Le formateur bruxellois a annoncé ce vendredi « faire un pas de côté » comme formateur, demandant à Ahmed Laaouej de prendre la main. Le socialiste a refusé. Christophe De Beukelaer, chef de file des Engagés, Elke Van den Brandt, cheffe de file de Groen, ont annoncé s’unir pour mener une mission d’information bruxelloise.
- Publié le 21-02-2025 à 17h33
- Mis à jour le 21-02-2025 à 19h03
La démission de David Leisterh en tant que formateur bruxellois, annoncée ce vendredi sur le coup de 17h30, n’a surpris personne sur le fond. »Après plus de 8 mois, force est de constater que malgré toute la force et la patience que j’ai pu y mettre, et ce jusqu’aux dernières heures avant ce communiqué de presse, les positions des différents partis ne permettent pas la formation d’une majorité », a annoncé le président du MR bruxellois dans un communiqué. « Plusieurs partenaires ont empêché toute exploration raisonnable d’une solution. À ce stade, je fais donc un pas de côté. »
« Après 8 mois, j’espère que mon pas de côté sera le passage obligé pour faire bouger les choses dans une dynamique positive et constructive. Mon souhait le plus profond depuis des mois est que Bruxelles dispose du gouvernement de réformes dont la Région a besoin », a-t-il ajouté.
L’annonce, en revanche, a étonnée sur la forme. La démission du formateur bruxellois devait, initialement, avoir lieu lors d’une conférence de presse, annoncée depuis lundi. David Leisterh, président du MR bruxellois, était censé y faire, ce vendredi à 17h, le bilan de sa mission « de la dernière chance ».
Parti pour mieux revenir?
Le président du MR bruxellois, profondément touché par l’échec de sa mission et malgré les tentatives de certains membres son entourage pour le convaincre, a finalement privilégié un autre format. L’annonce est tombée dans un communiqué de presse relativement lapidaire et sobre, et qui tranche avec les invectives de Georges-Louis Bouchez ces derniers jours dans la presse.
L’objectif de David Leisterh était, selon le porte-parole, d’éviter une stratégie de communication qui aurait pu passer pour trop agressive, préférant adopter un ton plus constructif, en vue d’éviter de compliquer encore davantage la situation.
David Leisterh, formateur bruxellois depuis sa victoire électorale du 9 juin, renonce donc, du moins provisoirement, à son rêve de devenir ministre Président bruxellois.
La déception du libéral de 40 ans est grande. « Je resterai disponible pour ces réformes tant attendues« , précise-t-il, espérant sans doute récupérer la main, en temps voulu.
Durant son interminable mission, David Leisterh s’est heurté à Ahmed Laaouej (PS), et à son refus obstiné de discuter avec la N-VA. Au CD & V, qui trop longtemps louvoyé. À des partenaires, dont l’Open VLD, qui ont refusé d’envisager sérieusement la piste CD & V, quand elle a enfin semblé se dessiner. À son propre président de parti Georges-Louis Bouchez qui, selon Rajae Maouane (Ecolo), « a saboté son travail ».
Le MR, frustré par le blocage socialiste, estime en quelque sorte que le temps est venu pour Ahmed Laaouej, après avoir si longtemps bloqué les discussions, de mettre les mains dans le cambouis.
Il passe la main à Ahmed Laaouej… qui la refuse
Dans cette logique, David Leisterh a demandé à Ahmed Laaouej de prendre la main. « Auteur d’une exclusive à l’égard du parti du Premier Ministre, il est indispensable que le deuxième parti au parlement, à savoir le PS, prenne ses responsabilités », écrit David Leisterh.
« C’est maintenant à Ahmed Laaouej de montrer qu’il peut faire mieux », l’a appuyé Frédéric De Gucht (Open VLD).
Sans surprise, Ahmed Laaouej a refusé de prendre la main.
« Des contacts bilatéraux pris ces derniers jours, et constatant la polarisation extrême mise en scène à son encontre, le PS Bruxellois est arrivé à la conclusion que seule une initiative menée par des partis qui recueillent la confiance de tous est de nature à apporter une réponse à la crise actuelle », a écrit la fédération bruxelloise du PS dans un communiqué, se disant toutefois prêt à contribuer à une solution.
« Vooruit soutiendra toutes les initiatives possibles pour sortir de cette impasse et adopter une attitude constructive« , a annoncé Ans Persoons, cheffe de file de Vooruit, dans la foulée.
Un duo Christophe De Beukelaer et Elke Van den Brandt
Peu avant 19h, Christophe De Beukelaer, chef de file des Engagés, Elke Van den Brandt, cheffe de file de Groen, ont annoncé s’unir pour mener une mission d’information bruxelloise.
« Nous tenons à saluer l’engagement de David Leisterh au cours de ces huit derniers mois. Il a mené cette mission avec détermination et multiplié les efforts pour bâtir une majorité stable. Son investissement mérite d’être reconnu« , ont-ils indiqué. « La décision de David Leisterh suspend de facto les négociations. Elke Van den Brandt met également en pause son rôle de formatrice néerlandophone pour pouvoir entamer une mission d’information bruxelloise avec Christophe De Beukelaer. »
Ils annoncent leur intention de recevoir dès lundi, les 13 chefs de file des partis bruxellois. « Nous identifierons les véritables points de blocage et organiserons des rencontres multilatérales pour tenter de les dépasser, avant d’envisager les prochaines étapes de la formation d’un gouvernement, en ce compris la désignation éventuelle de médiateurs ou de démineurs », ajoutent Christophe De Beukelaer et Elke Van den Brandt, cheffe de file de Groen. « Nous appelons chaque responsable politique à prendre ses responsabilités et à libérer son agenda ».
Le refus de prendre la main, certes, est fort commode pour un PS qui prétend depuis quatre mois qu’il est possible de remplacer la N-VA par le CD&V dans la majorité francophone, et ainsi débloquer la formation gouvernement bruxellois.
Ahmed Laaouej ne voit toutefois guère de raison de s’abîmer dans une mission suicide. Car il est évident que le socialiste, dont la cote de popularité est au plus bas auprès des partis flamands, n’a aucune chance d’obtenir un changement de cap des partis néerlandophones.
La pression de Belfius et la menace de tutelle
La mission de Christophe De Beukelaer et d’Elke Van den Brandt aura pour but d’apaiser les tensions de repartir d’une page blanche.
Il faudra tout de même bien, un jour, que les négociations bruxelloises atterrissent un jour…
Les finances bruxelloises sont dans un état alarmant. « Seul un nouveau gouvernement peut encore éviter une collision aux conséquences désastreuses« , a déclaré lundi le ministre du Budget Sven Gatz, comparant le gouvernement bruxellois au Titanic.
L’annonce de Belfius, qui a informé jeudi le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale qu’elle réduisait sa ligne de crédit de trésorerie de 500 à 200 millions d’euros, a été un coup de semonce.
Bart De Wever, Premier ministre, a lui aussi mis la pression sur les négociations bruxelloises, tandis que Georges-Louis Bouchez, président du MR a été jusqu’à évoquer jeudi à la Chambre la possibilité d’une « tutelle » du fédéral sur Bruxelles.
Ce blocage bruxellois, dans ses germes, recèle tous les ingrédients de la bombe politique et communautaire. Si elle explose, l’ampleur des dégâts qu’elle produira est impossible à prédire…