France

Vers une interdiction des véhicules surpuissants pour les jeunes conducteurs ?

A l’instar des jeunes permis moto, les nouveaux titulaires du permis B se verront-ils imposer une période probatoire pendant laquelle il leur sera impossible de conduire des véhicules de grosse cylindrée ? Après plusieurs accidents mortels impliquant des conducteurs inexpérimentés au volant de bolides gavés de chevaux, une proposition de loi a été déposée au Sénat pour encadrer la vente et la location des véhicules surpuissants.

Le 8 février dernier, dans le quartier de Wazemmes, à Lille, une étudiante de 23 ans a été percutée par un chauffard lancé à plus de 100 km/h dans une zone limitée à 30 km/h au volant d’une Golf immatriculée en Allemagne. Le conducteur a pris la fuite, laissant derrière lui sa victime décédée sur place des suites de ses blessures. « Nous avons commencé à travailler à ce texte de loi il y a plusieurs mois mais ce nouveau drame montre à quel point il est urgent d’agir », souligne la sénatrice du Nord Audrey Linkenheld.

L’Allemagne et la Pologne dans le viseur

La problématique n’est pas nouvelle, les sénateurs présentant ce texte citant notamment des faits remontant à 2020. Pour autant, les autorités s’inquiètent d’une amplification du phénomène comme 20 Minutes l’évoquait en septembre dernier, après la mort d’un agent municipal à Grenoble, percuté par un chauffard au volant d’une Audi RS3 de location immatriculée en Pologne. Toujours dans leur texte, les élus reconnaissent que « ces véhicules sont facilement accessibles à un public de conducteurs inexpérimentés, et de ce fait parfois peu préparé à gérer leur puissance ». Et de montrer du doigt l’Allemagne et la Pologne où les agences de location « peuvent ne pas être soumises aux mêmes exigences en matière de formation ou de sensibilisation » qu’en France.

« Faute de réglementation, nous avons établi nos propres critères pour la location de nos véhicules », explique à 20 Minutes Arnaud Jossomme, co-fondateur de l’agence de location AR Performance à Rennes. Pour repartir au volant d’un de ses bolides, il « faut avoir 21 ans et cinq ans de permis », assure-t-il. Les loueurs plus conventionnels, comme Europcar ou Rent a Car, imposent aussi des conditions pour les véhicules de leur gamme prémium, moins restrictives cependant, se limitant généralement à cinq ans de permis. « C’est bien, mais tous ne le font pas, souvent par peur des pressions exercées par certains clients », déplore la sénatrice du Nord.

Interdiction de vendre, louer, céder ou prêter

Du coup, le projet de loi vise à « poser un cadre » et « fixer une limite », « comme c’est déjà le cas pour le permis A2 pour les deux-roues », déclare Audrey Linkenheld. L’article unique de ce projet de loi vise à interdire la vente, la cession, la location ou la mise à disposition de véhicules surpuissants a un « conducteur avant l’expiration du délai probatoire » de son permis. La limitation de puissance sera définie « par voie réglementaire », « probablement autour de 200 chevaux ».

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L’idée est de responsabiliser les vendeurs, les loueurs et même les assureurs en instaurant une sanction dissuasive. « Nous nous sommes arrêtés à une contravention de 5e classe pouvant atteindre 1.500 euros, mais cela pourra être réévalué à la hausse lors des débats parlementaires », assure la sénatrice. Cette dernière estime que le projet de loi peut être discuté avant l’été et qu’il a de bonnes chances d’être adopté. « Il n’y a pas eu de levée de boucliers et le ministre est ouvert », se félicite Audrey Linkenheld.