Procès Le Scouarnec : « Inadmissible »… Pourquoi des médecins manifesteront devant le tribunal lundi à Vannes ?
Ils se rassembleront ce lundi 24 février à midi devant le tribunal judiciaire de Vannes (Morbihan). Une heure avant l’ouverture de ce que certains décrivent comme « le procès du siècle », le Syndicat de la médecine générale (SMG) veut protester contre la constitution de partie civile du conseil de l’Ordre des médecins dans le procès de Joël Le Scouarnec. Dans le même temps, un autre rassemblement se tiendra devant le siège du Conseil national de l’ordre des médecins à Paris.
Initiées par le syndicat de médecins et soutenu par plusieurs autres associations, ces manifestations ont pour but de dénoncer la posture de l’Ordre, qui se place parmi les victimes des ignobles agissements de l’ancien chirurgien. Agé de 74 ans, Joël Le Scouarnec sera jugé pendant quatre mois devant la cour criminelle départementale pour des faits de viols et d’agressions sexuelles commis sur 299 enfants de janvier 1989 à janvier 2014. A l’époque des faits, les victimes étaient âgées en moyenne de 11 ans.
Dans un communiqué, le syndicat et ses cosignataires estiment que le choix du conseil de l’Ordre de se porter partie civile « apparaît illégitime et irresponsable, voire insultant au vu de son inaction depuis 2006 ». Quelques mois plus tôt, Joël Le Scouarnec avait été condamné pour détention d’images pédopornographiques dans le cadre d’une vaste enquête mondiale menée par le FBI. Mais le chirurgien avait pu continuer à exercer, étant même titularisé le 1er août 2006 au centre hospitalier de Quimperlé (Finistère). « En raison des délais de traitement, le bulletin judiciaire n° 2 sollicité par le ministère de la Santé avant chaque nomination ne portait aucune mention en avril 2006 », rappellent les enquêteurs.

Lorsqu’ils apprennent finalement cette condamnation en juin 2006, ni le directeur du centre hospitalier ni le conseil départemental de l’Ordre des médecins n’engagent de poursuite. Car le praticien est considéré comme « sérieux, compétent, affable » et son arrivée a permis de « stabiliser l’activité chirurgicale de manière satisfaisante ».
« « Nous jugeons qu’il est inadmissible que l’Ordre des médecins n’exprime ni regrets ni excuses publiques par rapport à cette passivité irresponsable, à ces années de silence, lourdes de conséquences pour les victimes. Ainsi, nous ne tolérons pas qu’il ose se porter partie civile dans cette affaire, alors que sa responsabilité est engagée », dénonce le syndicat. »
Face aux critiques, le conseil de l’Ordre a répondu, estimant que c’est « pour garantir l’intégrité de la profession médicale que le Conseil a décidé d’être partie civile à l’audience ». Le CNOM assure qu’il a « engagé plusieurs réformes » pour renforcer la vigilance. « De tels actes n’auraient jamais dû se produire, et ne devront plus jamais se reproduire ».
Des carnets pour retrouver les victimes
Pendant quatre mois, les très nombreuses victimes seront entendues, tout comme les responsables du conseil de l’Ordre et les anciens employeurs du chirurgien. Pour retrouver les victimes (elles étaient 312, mais certains faits sont prescrits), les gendarmes ont utilisé les carnets que le chirurgien cachait chez lui. C’est là que le médecin avait scrupuleusement noté le nom des victimes et les sévices qu’il leur avait fait subir. Pour beaucoup, ces atrocités ont été commises alors qu’elles étaient endormies, certaines n’en gardant aucun souvenir.