Algérie

Oran : 300 milliards de centimes détournés par des banquiers « naïfs »

La cour d’appel d’Oran a rendu son verdict mardi dans une affaire de fraude portant sur 300 milliards de centimes, impliquant 35 accusés, dont 14 employés d’agences bancaires. Les établissements concernés sont : la Arab Banking Corporation, la Banque extérieure d’Algérie, la Banque Natixis Relizane, la Gulf Bank Algérie et l’Arab Bank.

Parmi les condamnés, sept ans de prison ont été prononcés à l’encontre de (A.B.A), ancien directeur de l’agence bancaire 311 de la Bank ABC, et de (M.J), directeur de l’agence Emir Abdelkader de la Banque Extérieure d’Algérie.

Les coaccusés (J.B) et (I.H.C), collaborateurs du principal accusé, Ibrahim Relizani, dans la création de sociétés-écrans, ont écopé de peines similaires, assorties d’amendes de 185 millions de dinars pour le premier et de 150 millions de dinars pour les trois autres.

Les huit accusés ayant « géré » ces sociétés-écrans sont chacun été condamnés à quatre ans de prison ferme. Les autres prévenus ont reçu des peines allant de deux ans de prison avec sursis à trois ans de prison ferme.

Un seul accusé, (H.H.S), caissier principal à la Arab Banking Corporation, a été acquitté faute de preuves. Par ailleurs, un jugement par contumace a été rendu, condamnant à vingt ans de prison quatre accusés en fuite, dont Ibrahim Rélizani, considéré comme le cerveau de l’opération. Le parquet a requis l’application des peines maximales prévues par la loi pour l’ensemble des accusés.

Les charges retenues dans cette affaire incluent la fraude fiscale, la formation d’une association de malfaiteurs, la falsification et l’utilisation de documents commerciaux et bancaires contrefaits, ainsi que des violations de la législation sur le change et les mouvements de capitaux. Les accusés sont également poursuivis pour enrichissement illicite, abus de fonction et non-déclaration de soupçons de blanchiment d’argent.

Les détails de l’affaire de fraude impliquant 300 milliards de centimes

Les faits remontent à des opérations d’importation fictives menées par 12 sociétés existant uniquement sur le papier, via 146 transactions entre 2009 et 2014. Ces sociétés ont été créées sous la direction d’Ibrahim Rélizani, qui, selon les enquêtes, coordonnait les opérations depuis la France.

Rélizani possédait deux sociétés de commerce extérieur qui fonctionnaient normalement entre 2003 et 2005, sans susciter de soupçons. Sa femme menait également des activités commerciales sans irrégularités apparentes.

Les investigations ont révélé que Rélizani, en fuite, déposait lui-même les fonds sur les comptes bancaires des sociétés-écran, notamment à l’agence 311 de la Arab Banking Corporation.

Il se présentait comme comptable de ces sociétés, une fonction validée par le directeur de l’agence, (A.B.A), qui facilitait ainsi ses transactions. Ce dernier contournait les procédures officielles en déposant directement les déclarations douanières dans les dossiers de Rélizani, au lieu de les transmettre par voie postale officielle.

Lors des interrogatoires, les gérants présumés des sociétés-écrans ont affirmé qu’ils ignoraient que ces entreprises n’existaient que sur le papier, se disant victimes de leur propre naïveté et ignorance. Ils recevaient des paiements mensuels, ainsi que des commissions pour chaque opération bancaire effectuée, allant de 10 à 40 millions de centimes.

Les sociétés-écrans au cœur de la fraude

L’enquête a débuté suite à une instruction du parquet d’Oran, après que la cellule de traitement des renseignements financiers de la Arab Banking Corporation ait signalé des irrégularités dans les mouvements de capitaux impliquant la société Long Electronic, gérée par (M. Mourad).

Les investigations ont révélé que des déclarations douanières falsifiées avaient été utilisées pour des opérations d’importation fictives, permettant le détournement de près de 2,7 milliards de dinars dans les agences bancaires d’Oran.

Dans le cas de la Banque Natixis Rélizane, le montant des transactions frauduleuses s’élève à 170 millions de dinars, portant le total des devises détournées à près de 2 milliards et 853 millions de dinars (environ 300 milliards de centimes).

Les enquêteurs ont également découvert un transfert illégal de 18 millions de dinars vers le compte d’une société impliquée, utilisé pour l’achat de 11 véhicules par des personnes sans lien avec les entreprises concernées.

Les transferts de devises étrangères à l’étranger se sont poursuivis malgré la mise en place, en 2014, d’un système informatique reliant les banques aux douanes nationales.