Comment les employeurs peuvent-ils résoudre le casse-tête de la santé mentale au boulot ?

Le monde du travail continue d’avoir le blues. D’après une étude Ipsos réalisée pour Qualisocial et publiée le 29 janvier, un quart des travailleurs français se déclare en mauvaise santé mentale. La tendance ne date pas d’hier : le baromètre de l’an dernier affichait peu ou prou les mêmes résultats inquiétants.
Des milliers d’offres d’emploi en un clic
Pour l’heure, les entreprises ne semblent pas avoir toutes avoir saisi l’importance de ce phénomène, déclaré grande cause nationale de 2025. Denis Betand, responsable au sein de la CGT Santé Action Sociale, déplore le manque de considération pour le bien-être des salariés : « les normes et protocoles purement comptables dictés par des cabinets de conseil détruisent le lien entre le travailleur et son lieu de travail. » Comme l’explique Adrien Chignard, psychologue du travail, deux types de structures sont à distinguer : « Celles qui ont compris que la santé mentale est un enjeu de performance, et celles qui continuent d’ignorer le sujet, au risque de fragiliser leur propre organisation. »
Julia Néel Biz, cofondatrice de Teale, une plateforme d’aide et de prévention en santé mentale pour les entreprises, remarque néanmoins une évolution des mentalités depuis le lancement de sa startup en 2021 : « Les entreprises étaient encore réticentes à aborder la santé mentale comme un enjeu stratégique. Aujourd’hui, elles savent que c’est une priorité, mais la question est : comment agir concrètement ? »
Un corps sain… dans une entreprise saine
D’après une étude menée par Indeed en octobre 2024, plus d’un salarié sur trois (37 %) pense que rester dans son entreprise actuelle met en péril sa santé mentale. « On sait ce qui peut aider à restaurer la santé mentale : le lien social, l’autonomie, et des environnements de travail sains », explique le psychologue.
Les entreprises doivent créer un climat de sécurité psychologique, où chacun peut exprimer ses difficultés sans crainte d’être jugé ou sanctionné. Pour Julia Néel Biz, l’émergence d’un tel climat doit passer par « former les managers, équiper les collaborateurs d’outils adaptés et organiser des campagnes de sensibilisation pour libérer la parole sur la santé mentale ».
C’est d’ailleurs le positionnement de Teale, organisme formateur agrée, qui propose de l’accompagnement à l’échelle de l’entreprise ou individuelle, en mobilisant les sciences neuropsychologiques. « Nous avons une approche scientifique, qui est le fruit de la recherche et de plusieurs années d’expérience », déclare la cofondatrice de la start-up.
Le sujet prend de l’ampleur au point de passer au premier plan chez certains. Dans le dernier baromètre Nomad Education, réalisé pour notre partenaire Actual, sur les jeunes et leur rapport au travail, on apprend que l’équilibre « vie pro – vie perso » arrive en tête des priorités pour 34 % sondés. Juste avant le salaire (28 %) mais loin devant le contenu du poste (12 %). Indéniablement, cet équilibre est essentiel au bien-être : « La santé mentale ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise. La vie en dehors n’est pas un sujet distinct : c’est un continuum », confirme Julia Néel Biz.
Des entreprises maladroites
Adrien Chignard constate que trop d’employeurs font encore la confusion entre « ce qui est sain et ce qui est agréable. La santé mentale au travail, ça ne consiste pas à organiser des séances de yoga ou du team building. C’est avant tout des conditions de travail qui permettent aux salariés de bien faire leur job sans s’épuiser. »
Et là-dessus, attention à ne pas trop en faire. Il faut prioriser la fréquence à l’intensité, explique le psychologue : « Pour pouvoir prendre soin de sa santé mentale, c’est avant tout du petit entretien régulier. Il vaut mieux en prendre soin une fois par semaine de façon douce, plutôt qu’une fois par an. » Ainsi, un repos très brutal, qui viendrait après une période trop intense de travail serait quelque peu inutile. Pire encore, « il peut dégrader la santé mentale », prévient le professionnel de santé. Au bout du compte, tout reste une question de dosage – et de bonne volonté.