France

Soupçons de financement libyen : Mallettes de cash et villa en Colombie… Le tribunal piste l’argent

Le procès des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy a pris une tournure plus technique alors que le tribunal cherche à reconstituer les flux d’argent présumés occultes. Mallettes de cash, virements douteux, témoignages et dénégations ont rythmé les audiences.

Claude Guéant, ancien ministre de l’Intérieur et ex-directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, s’est retrouvé à la barre, soumis à une heure d’interrogatoire par jour en raison de son état de santé. Face aux accusations selon lesquelles l’intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine aurait pénétré à plusieurs reprises dans le ministère de l’Intérieur avec des valises pleines d’argent, il s’est défendu : « On n’entre pas au ministère de l’Intérieur comme dans un moulin ».

« Je n’ai jamais vu d’argent libyen »

La veille, Nicolas Sarkozy avait balayé avec force cette hypothèse, dénonçant une « idée folle ». Il insiste : « Mes propres enfants étaient contrôlés ! » avant de fustiger l’accusation d’un ton théâtral : « C’est inconcevable, ça n’a pas de sens ! C’est l’endroit le plus gardé de France ! ». Puis, interrogé frontalement par la présidente du tribunal sur un lien avec sa campagne, il martèle : « Non, Non, et Non ».

Claude Guéant, lui aussi, a rejeté catégoriquement toute implication : « Je n’ai jamais vu d’argent libyen, jamais », affirmant que les seuls cadeaux reçus de Mouammar Kadhafi étaient « une sorte de tenue traditionnelle et une caisse de dattes ».

Des virements suspects dans la ligne de mire

Mais au-delà des remises de cash évoquées par plusieurs dignitaires libyens, l’enquête a mis en lumière des transferts bancaires suspects. Trois virements, pour un total de six millions d’euros, ont été retracés vers un compte appartenant à Ziad Takieddine.

Thierry Gaubert, ancien proche de Nicolas Sarkozy et déjà condamné dans l’affaire Karachi, est appelé à s’expliquer sur un virement de 440.000 euros reçu en 2006 de la part de Ziad Takieddine. Il a affirmé qu’il s’agissait d’un financement pour un ami souhaitant achever la construction d’une villa en Colombie, expliquant que ce dernier « n’avait pas de compte à l’étranger » et avait donc dû transiter par son propre compte aux Bahamas.

Une chronologie très troublante

La présidente du tribunal, sceptique, l’a questionné : « C’est impossible d’envoyer de l’argent en Colombie si on n’a pas de compte ? ». Thierry Gaubert a hésité et avancé de nouvelles justifications : « A un moment il y a eu des squatteurs, il a fallu les sortir ». Irritée par les explications confuses de l’accusé, la juge s’est agacée : « A chaque réponse, un nouveau détail apparaît », rappelant que « l’association de malfaiteurs est une infraction grave ».

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Enfin, la présidente a mis en évidence une chronologie troublante : le 31 janvier 2006, un virement libyen est réalisé sur le compte de Ziad Takieddine. Deux jours plus tard, il a transféré 440.000 euros à Thierry Gaubert. Or, à cette même période, une note de ce dernier mentionnait « NS campagne ». Elle a questionné alors frontalement l’accusé : « Une coïncidence ? ». Un silence gêné s’installe. Thierry Gaubert, décontenancé, a bredouillé que « le plus important, c’est de montrer que ça ne peut pas avoir servi à la campagne ».