Voie réservée sur le périphérique : « Injuste », « la banlieue qui trinque », « inévitable »… La mesure divise fortement
Paris est-il sur la bonne voie ? Ce lundi, la mairie a annoncé l’application d’une voie réservée à partir du 3 mars prochain sur le boulevard périphérique. Pour faire simple, aux heures de pointe, la voie de gauche accueillera exclusivement les véhicules transportant au moins deux personnes, les taxis, bus et véhicules de secours. Il en sera de même pour des portions des autoroutes A1, A13 et A12.
Une mesure à laquelle les Franciliens avaient déjà partiellement goûté pendant les JOP de Paris 2024, dont cette voie est l’héritage comme la toujours voulu la municipalité parisienne, Anne Hidalgo en tête, et justifiée par une volonté de réduire la pollution de l’air (6.900 cas d’asthme chez des enfants pourraient être évités chaque année en Île-de-France en abaissant les niveaux de celle-ci) et les nuisances sonores pour les 550.000 riverains de l’anneau routier.
Pas si facile de trouver un covoitureur
La décision divise, à commencer par Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France qui a fustigé, dans la foulée de l’annonce, des risques « d’embouteillages massifs aux portes de Paris », sur des voiries « secondaires » et sur les autoroutes franciliennes. Une position que partage une partie de nos lecteurs et lectrices.
« Cela n’a pas de sens. Les personnes utilisent leur voiture pour le trajet domicile/travail. Pour beaucoup c’est impossible de faire du covoiturage », argue Stéphanie. Comme elle, beaucoup n’arrivent pas à trouver de collègues, ou de voisins qui pourraient effectuer le même trajet et partager un habitacle pour bénéficier de cette « nouvelle » voie dédiée. Gwenola, malgré ses efforts, est dans ce cas et fait partie des « pénalisés » : « C’est très compliqué d’avoir quelqu’un qui fait le même aller-retour et en plus aux mêmes horaires ! »
« Ça va créer l’inverse de l’objectif souhaité »
Résultat, le « périph » risque de n’en ressortir que « davantage saturé » d’après Gauthier qui pointe selon lui « une évidence » : « Cela revient tout bonnement à supprimer une voie de circulation et donc à créer l’inverse de l’objectif souhaité en augmentant les embouteillages, et donc la pollution et le bruit. »
Des nuisances qui pourraient ainsi se reporter « notamment sur l’A86 » regrettent amèrement Marc : « C’est le but, atteint, de la mairie de Paris qui veut virer les voitures de la capitale pour en faire un parc d’attractions pour les vacanciers et les gens assez riches pour y vivre. Et en attendant, ce sont les banlieues qui trinquent… »
Et elles ne seront pas les seules d’après Carole qui craint, elle, pour les professions libérales : « Obligés le plus souvent de circuler seuls, ces travailleurs vont se retrouver dans les bouchons renforcés, ce qui va altérer encore plus leurs capacités et leur vitesse d’intervention. C’est injuste ! »
Injuste et dangereux tout simplement pour les automobilistes d’après Quentin qui voit poindre une vague d’accidents d’après ses observations faites lors des Jeux olympiques : « Les taxis et ambulances vont devoir couper toute la route lorsqu’ils vont vouloir sortir du périphérique, c’est très dangereux parce qu’ils le font souvent sans regarder. »
Sans être aussi alarmiste, Paul appuie cette crainte de par son expérience lyonnaise : « Si vous respectez la limite de vitesse sur la voie de gauche, vous êtes souvent doublé par des véhicules plus rapides par la droite. C’est très angoissant parce que vous avez peur de vous déporter pour sortir. »
Des sorties souvent synonymes de bouchons puisque les véhicules de gauche sont obligés de couper la route et de ralentir en même temps pour emprunter une bretelle, selon Sébastien. Bien que favorable à la mise en place d’une voie réservée et de mesures pour limiter le trafic automobile, il se rappelle des nœuds à la porte de Clichy à cause de l’amoncellement de véhicules sur la voie de droite pendant les JO : « A chaque grosse sortie, toutes les voies se retrouvent bloquées. »
« L’avenir n’est pas à la voiture, il faudra s’y faire »
Une réalité selon Marion, mais par laquelle il faut en passer pour désengorger le trafic routier de manière générale : « Ça ne peut pas se passer sans difficultés, mais c’est un mal nécessaire pour convaincre les gens de moins utiliser la voiture, de faire du covoiturage ou de prendre les transports en commun, à condition que ces derniers soient au niveau. De toute façon c’est inévitable, l’avenir n’est pas à la voiture, il faudra s’y faire », dit-elle en avouant avoir déjà acheté un vélo électrique pour parcourir quotidiennement les 13 kilomètres qui la sépare de son bureau.
Notre dossier sur le périphérique
Finalement, Emmanuel se charge de rassurer tout le monde en apportant son expérience de la ville d’Atlanta, aux Etats-Unis, ou il vit désormais, et qui applique cette même voie réservée depuis de nombreuses années : « Cela fluidifie la circulation et j’apprécie beaucoup cette voie car je voyage souvent avec ma femme et mon fils. Cela nous évite de nous retrouver coincés dans des bouchons. Je trouve que c’est une excellente initiative qui contribue également à réduire la pollution. J’espère même que cela sera étendu à toutes les grandes villes de France et que le peuple français, souvent râleur, découvrira et appréciera cette nouvelle voie. »