Rennes : « Si ça permet de changer l’image du quartier »… Le musée des Beaux-arts ouvre à Maurepas, miné par le trafic
Des dealers qui vendent leur came au pied des tours. Pour les habitants de Maurepas, un quartier populaire au nord de Rennes, la scène est tristement banale. Rongé par le trafic de stupéfiants depuis plusieurs années, le quartier le plus pauvre de Bretagne a également sombré dans la violence avec des fusillades, des coups de couteau et des règlements de comptes à n’en plus finir. Si le calme semble revenu depuis le début de l’année, tout le monde sait ici que cet équilibre est précaire et que les armes peuvent de nouveau sortir.
Dans ce contexte, la culture, puissant levier d’inclusion sociale, peut-elle apaiser les tensions ? C’est en tout cas la volonté de la ville, qui a investi 2,5 millions d’euros pour construire une antenne du musée des Beaux-arts au rez-de-chaussée de l’immeuble « La banane », une grande barre de 244 logements. Inauguré ce samedi, l’équipement culturel de 400 m2 accueillera chaque année deux expositions temporaires, avec des œuvres issues des collections du musée situé quai Emile Zola, dans le centre-ville de Rennes. « Ces œuvres dormaient dans les réserves et c’était bien dommage, donc on a créé de nouveaux murs pour les accueillir », indique Solène Thonon, conseillère municipale déléguée aux musées.
« Ce lieu participe au combat pour une justice sociale »
L’élue n’est pas naïve. Elle sait très bien que l’ouverture de ce musée ne chassera pas les dealers et le trafic dans le quartier. « Nous n’avons pas cette prétention, mais ce lieu culturel est un signe que l’on n’abandonne pas les habitants, assure-t-elle. C’est un moyen aussi de faire tomber les barrières pour que chaque enfant et chaque habitant du quartier aient accès comme tous les autres à la culture ».
Pour lever les freins, la ville a d’ailleurs choisi de rendre l’accès au musée entièrement gratuit, comme c’est déjà le cas dans plusieurs lieux culturels. « Mais la gratuité ne suffit pas, prévient Marc Hervé, premier adjoint délégué à l’urbanisme. Il y a aussi des barrières sociologiques à faire tomber pour permettre à chacun de développer son capital socioculturel. Ce musée participe au combat pour une justice sociale ».
Brasser les populations et attirer les Rennais
Avec la station de métro du Gros-Chêne au pied du musée, les élus espèrent aussi que le lieu brassera les populations et attirera des habitants de l’agglomération qui n’ont jamais mis les pieds dans le quartier. Une volonté que partage Yvonne, une habitante croisée à quelques pas du musée. « Tant mieux si ça permet de changer l’image du quartier, indique-t-elle. Car même si la situation s’est dégradée, il y a plein de choses positives qui s’y passent. Et malgré la pauvreté, il y a des liens et une solidarité incroyable entre habitants ».
Ayant « un agenda de ministre » ce week-end, la retraitée ne sera pas de la partie pour l’inauguration. Mais dès qu’elle trouvera le temps, elle ira rapidement découvrir les collections du musée. « C’est quand même classe, non, d’avoir un musée des Beaux-arts juste à côté de chez soi ? », sourit-elle avant de s’engouffrer dans les couloirs du métro.