Grève inédite de l’OFB : Il faut « renouer le dialogue avec les agriculteurs », assure la ministre de l’Agriculture
C’est un taux historique. Plus de 62 % de grévistes ont été recensés au sein des services départementaux de l’Office français de la biodiversité. Du jamais vu depuis sa création en 2020, ni même, de mémoire d’agents, depuis la création des deux établissements constitutifs de l’OFB : l’Agence française pour la biodiversité datant de 2016, et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage érigé en… 1972 !
Dans un contexte de tensions extrêmes entre le gouvernement, le monde agricole et l’OFB, ses agents avaient déposé un préavis de grève, ce vendredi. Le résultat de joutes verbales incessantes par médias interposés, depuis plusieurs semaines. Avec, comme point d’orgue, les propos tenus par le Premier ministre lors de son discours de politique générale, le 14 janvier. François Bayrou n’avait pas hésité à taper fort sur les agents de l’OFB dont il avait qualifié les inspections des fermes « une arme à la ceinture », d’« humiliation » et de « faute » envers les agriculteurs.
180 conflits sur 400.000 contrôles
Pourtant, le rapport d’une mission flash d’inspection interministérielle non publié, divulgué par Contexte et que 20 Minutes s’était aussi procuré, aurait presque pu mettre tout le monde d’accord. Loin d’attiser les flammes, il déconstruit plutôt l’idée selon laquelle les conflits entre agriculteurs et agents de l’Office français de la biodiversité seraient nombreux, violents et récurrents. « La mission « contrôles » a démontré que le nombre de contrôles et de suites était en fait très faible dans le secteur agricole et relève essentiellement du domaine du ressenti », est-il écrit.
Au total, seules « 180 situations relationnelles conflictuelles » ont été répertoriées par l’OFB, « pour un total d’environ 400.000 contrôles », depuis 2020, rappelle le rapport. « Oui, mais 180 conflits sur la planète agricole, ça fait le tour de tous, a commenté la ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Annie Genevard, auprès de 20 Minutes. Ce ne sont peut-être que 180 contrôles qui se passent mal, mais ils se produisent sur un terrain très fragile, où il y a de la souffrance », analyse-t-elle.
« On ne pouvait pas rester comme ça »
Pour celle qui explique aimer être en contact constant avec le monde agricole et ses acteurs, il s’agit plutôt, ici, d’essayer de réconcilier « deux mondes hermétiques l’un à l’autre ». Et bien que les contrôles administratifs et judiciaires des agriculteurs ne représentent qu’une infime partie des missions échouées à l’OFB, elle affirme qu’ils sont au cœur de toutes les discussions : « je ne fais pas un déplacement sans que l’on m’en parle ! Ce qu’il faut comprendre, c’est que quand un agriculteur voit arriver un agent de l’OFB dans sa ferme, il a peur d’avoir mal fait quelque chose, malgré lui. Sauf que les agriculteurs ont besoin qu’on leur montre qu’on leur fait confiance. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas être contrôlé du tout », précise-t-elle.
Elle assure s’être emparée du problème dès son arrivée au ministère, pour tenter de calmer le jeu de chaque côté, de peur que « cette affaire ne se termine mal », raconte-t-elle. « Je me suis attaquée assez vite à cette question parce qu’on ne pouvait pas rester comme ça. J’ai donc mis en place deux choses qui me paraissaient essentielles : le contrôle administratif unique, qui limite à un le nombre de contrôles par an et par exploitation. Puis, avec Agnès Pannier-Runacher, nous avons rédigé une circulaire adressée aux agents de l’OFB pour leur demander, notamment, de renouer le dialogue avec les agriculteurs », explique-t-elle.
Donner « la priorité au facteur humain »
Car l’humain reste un élément central, notamment mis en évidence dans le rapport de la mission flash interministérielle, dont l’un des quatre points clés est de donner « la priorité au facteur humain, point d’entrée incontournable de relations plus apaisées ». « Cela passe en premier lieu par un travail sur la posture et l’approche plus pédagogique des contrôleurs mais également par une meilleure acceptation des contrôles par les agriculteurs », détaille le texte.
La ministre maintient qu’une partie de la solution a déjà été trouvée : doter les agents de l’OFB d’un équipement pour dissimuler leur arme, « plus discret », explique-t-elle. Et le port d’une caméra-piéton, « déjà en vigueur chez les pompiers et les policiers », précise Annie Genevard. Des mesures qui permettent de « contribuer à apaiser la situation », mais qui « ne suffiront pas à elles seules », commente le rapport. Et qui ne semblent satisfaire, pour l’heure, ni les agents de l’OFB qui craignent pour leur sécurité, ni les agriculteurs qui appellent au désarmement.
Notre dossier sur les agriculteurs
Enfin, les chambres d’agriculture départementale seront également chargées d’organiser des rencontres entre les agriculteurs et les agents de l’OFB. Et une charte de bonnes pratiques sera également établie entre les deux parties « de manière contractuelle », précise la ministre.
En attendant, un appel « à l’apaisement et au respect mutuel » a été lancé, hier, par la direction de l’OFB, qui a souhaité rappeler, par voie de presse, que « les agents de l’OFB exercent leurs missions de contrôle dans le strict respect des lois et du code de l’environnement ».