C’est quoi le secret des casques Mips, qui protègent le cerveau en cas de chute à vélo ?
De leur premier casque d’équitation en 2007 aux casques qui équiperont durant l’été 2025 près de 90 % des coureurs du Tour de France, les Suédois de Mips se sont imposés. Peu de disciplines sportives résistent aux technologies de protection développées par cette société pour rendre les casques de sport beaucoup plus protecteurs. Alors qu’un casque sur cinq vendus en France intègre Mips, 20 Minutes a souhaité interroger Max Standwitz, le PDG de Mips, pour en savoir plus.
Comment l’histoire de Mips a-t-elle commencé ?
À la base de Mips, il y a trois scientifiques, dont un docteur en neurochirurgie qui avait de nombreux patients accidentés, soufrant de blessures importantes au cerveau, bien plus que de classiques fractures occasionnées par les chutes. Il a rapidement compris qu’un classique casque ne protégeait pas correctement. La raison ? À l’intérieur du casque est présent un moule préformé. En cas d’accident, cette forme s’écrase et absorbe l’énergie.
Le problème est que lorsque l’on chute alors que l’on roule, le choc occasionné au casque ne prend pas en compte la vitesse. Le casque absorbe le choc, mais la tête à l’intérieur du casque ne peut pas bouger.
Comment fonctionne un casque de protection Mips par rapport à un casque de vélo conventionnel ?
Comme avec le cerveau qui, à l’intérieur du crâne, baigne dans du liquide. En cas de choc, le cerveau se déplace légèrement dans le liquide. D’une part, la force du choc est plus diffuse, d’autre part, le cerveau se déplace légèrement, ce qui peut éviter des dommages irréparables.
Avec Mips, une structure permet donc un mouvement omnidirectionnel de la tête dans le casque, de 10 à 15 millimètres, lors de certains chocs obliques. But : réduire la force rotationnelle transmise à la tête par l’impact.
Dans le cadre du vélo, votre technologie est-elle plus efficace selon une pratique urbaine ou sportive ?
Elle l’est dans tous les cas de figure. Beaucoup de gens disent que le plus gros problème est la vitesse, mais il est avéré qu’en marge de cela, l’angle avec laquelle la tête heurte le sol peut devenir le pire des facteurs.
On voit beaucoup de motards qui font des chutent à grande vitesse, qui glissent sur le sol et se relèvent. La raison est que leur tête n’a pas heurté le sol ou un obstacle, comme une voiture. Lorsque cela est le cas, la mort est souvent certaine. Et quand la force occasionnée par la chute peut se dissiper (et c’est ce que permet notre technologie), le risque est largement minoré.
Du coup, les classiques casques de vélo ne protègent pas assez leur utilisateur ?
Je dirais les choses autrement : les casques traditionnels ne sont pas conçus pour éviter les blessures graves au cerveau, mais davantage pour protéger la boîte crânienne.
Prenez le cas de l’avant d’une voiture, qui est conçu pour absorber la force d’un choc frontal en cas d’accident : la compression des matériaux le permet jusqu’à un certain point. C’est ainsi que sont depuis toujours conçus les classiques casques de protection pour les cyclistes, pour absorber autant que possible un choc direct. La différence avec Mips est donc l’absorption du choc, mais aussi du choc avec un angle, une rotation.
Lors de l’achat d’un casque, les consommateurs vont privilégier un design, une couleur, un prix. Comment les convaincre des bienfaits de votre technologie ?
À ce jour, Mips a développé une douzaine de technologies. Elles sont pensées pour être intégrées à différents types de casques. Pour les coureurs du Tour de France, nous sommes par exemple parvenus à réduire le poids de notre système à 7 grammes, ce qui est excessivement léger, mais ce qui occasionne un coût très élevé en matériaux spécifiques. La solution la moins onéreuse pèse, elle, 30 grammes, mais effectue le même boulot.
Chez Mips, nous avons toujours clamé que la sécurité de nos utilisateurs ne doit pas déprendre de l’épaisseur de leur porte-monnaie. Résultat : notre niveau de protection est toujours identique. En revanche, nous savons adapter la fabrication de nos solutions aux tarifs pratiqués par les fabricants de casques.
Ainsi, le premier prix d’un casque de protection Mips doit avoisiner les 30 euros, environ. Le concept qui consiste à rediriger l’énergie occasionnée par un choc reste identique. Avec Décathlon, par exemple, nous avons eu autant d’approches que de marques « maison » de casques commercialisés : Van Rysel pour des casques dédiés aux cyclistes en quête de performances ; Btwin, plutôt pour un usage quotidien et urbain ; Rockrider, pour le vélo de montagne ; et Wedze pour le ski.
Justement, votre technologie peut-elle être adaptée à toutes les disciplines ?
Notre postulat reste de nous adapter aux risques de blessures qui peuvent être occasionnées dans telle ou telle discipline, aux critères spécifiques qui leur sont propres. Il y a quelque temps, nous avons été approchés pour adapter Mips à des casques de protection pour le baseball. Nous avons réalisé beaucoup de tests, mais sans constater qu’il pouvait se reproduire des chutes type pour que l’on adapte notre technologie à ce sport.
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Qu’en est-il du marché français, quelle est votre implantation ?
Si l’on demande aux Français quelle est la marque de casques de protection qui fait référence, la plupart l’ignorent… ou citent Décathlon. On voit cependant qu’en France, la présence des casques avec la technologie Mips s’accroît d’année en année, avec de nombreux partenaires, comme Décathlon, mais aussi Salomon, Cébé, Bollé, ekoi… Nous équipons 87 % des coureurs du Tour de France.
Aujourd’hui, on peut dire qu’un casque sur cinq vendus dans l’Hexagone est un casque avec la technologie Mips. Notre part de marché évolue très vite. D’ici deux à trois ans, on parlera sans doute de 40 à 50 % de parts de marché. À titre de comparaison, la Suède, dont nous sommes originaires, a adopté Mips dans 70 à 80 % des casques. 50 à 60 % aux Etats-Unis. Il n’y a paradoxalement qu’en Hollande où les ventes sont très basses. Culturellement, les Hollandais qui pratiquent beaucoup le vélo, ne portent pas de casque de protection…
Certains prônent l’usage d’un casque intégral sur les vélos, qu’en pensez-vous ?
Beaucoup des accidents dont nous sommes témoins aujourd’hui impliquent en effet le bas du visage, comme au ski, par exemple. Un casque au design traditionnel mal serré a de fortes chances d’être éjecté. Il peut donc être judicieux d’ajouter autant de niveaux de protection que possible, selon l’activité que l’on exerce et qui nécessite le port d’un casque. Une protection devant la bouche et le menton, ça ne peut pas être mal.
La technologie Mips peut-elle s’appliquer à toutes les typologies de casques ?
Non, pour les casques les moins chers qui peuvent facilement se casser et pour laquelle notre technologie n’apportera rien. Non, pour les casques qui ne disposent pas de jugulaire, car le casque sera éjecté à la moindre occasion. Oui pour les autres.