NBA Paris Games : Victor Wembanyama plus « extraterrestre » que jamais pour se sublimer face à la pression
A l’Accor Arena de Paris Bercy,
Rick Carlisle va-t-il tenter d’empêcher Victor Wembanyama de prendre le micro, samedi au centre de l’Accor Arena de Bercy, avant la revanche des NBA Paris Games ? L’expérimenté entraîneur des Pacers semblait en tout cas accorder du crédit aux quelques secondes de prise de parole de l’intérieur des Spurs jeudi soir, juste avant le récital de son équipe (140-110). « Je ne sais pas ce que Victor a dit au public avant le match, mais en tout cas ça a marché », notait ainsi Carlisle avec malice en conférence de presse.
En vrai, il a suffi d’un simple « Bonsoir Paris » de la part de « Wemby » pour embraser l’enceinte ultra sold-out, avec ses 15.935 spectateurs présents et en apparence bruyants. Rétrospectivement, avoir à ce point fait réagir Bercy durant un instant est peut-être la plus grosse perf de la soirée pour le bluffant joueur de 21 ans, davantage encore que sa flopée d’actions d’éclat.
Peu d’ambiance malgré la « Wembymania »
Car un peu à l’image de la finale rêvée des JO 2024 France-Team USA cinq mois plus tôt, les tarifs vertigineux (un prix moyen à plus de 250 euros) de ces NBA Paris Games peuvent sans doute aider à comprendre l’ambiance résolument feutrée, davantage encore que dans certaines salles américaines. A la décharge du public, une telle raclée, facilitée par l’infâme défense d’Indiana (80 points encaissés en deuxième mi-temps !), n’aide pas à s’emballer sur la durée.
La faute il est vrai à un Victor Wembanyama pile dans le ton de l’événement. Dès l’échauffement, un « tomar » en passant le ballon entre ses jambes (après l’avoir balancé contre la planche), à même de remporter un concours de dunk au All Star Game, nous soufflait qu’on allait avoir droit à un « Wemby » dantesque. « C’est un grand joueur et la France peut en être fière, reprend Rick Carlisle. Il arrive à faire des choses à couper le souffle. »
Pour vous en persuader, on vous conseille d’avancer votre replay jusqu’à la fin du troisième quart-temps. Après une première moitié de match équilibrée (60-57), San Antonio a déjà pris le large (94-78) lorsque « Wemby » renverse tout en à peine plus d’une minute. Piochez à votre guise ci-dessous.
- On commence par un immense contre sur la planche sur la finition qui aurait dû être facile pour Ben Sheppard.
- Le Français récupère, il trace à la course ce même Sheppard, pourtant un arrière, avant d’offrir un caviar en alley-oop à Jeremy Sochan.
- Sur l’action suivante, il bâche cette fois TJ McConnell de manière hallucinante. Puis en transition, le voici qui glisse une nouvelle passe dé à Julian Champagnie.
- Aaron Nesmith lance la révolte des Pacers ? Bim, nouvelle crêpe à vous écœurer de la balle orange.
- A la relance, « Wemby » enchaîne un nouvel alley-oop avec Sochan, cette fois-ci dans la peau du joueur concluant avec un dunk.
- Pour clôturer la séquence, on a même failli avoir un quatrième block de rang, mais l’ancien Met est cette fois arrivé un brin trop tard dans son intervention contre la planche.
Wembanyama « incroyable et effrayant »
Largué là-dessus à – 23, Indiana n’existera plus dans cette rencontre. Et à bien y réfléchir, cet enchaînement hors du commun a été le seul moment de la soirée capable de nous faire autant vibrer que les prestations live de Nicole Slack et Sandra Brandon sur les hymnes américain et français.
A la fois « incroyable et effrayant », dixit son coach Mitch Johnson, « Wemby » a au final combiné 30 points (à 13/21 aux tirs), 11 rebonds, 6 passes et 5 contres jeudi, le tout en 32 minutes. Avec une autre sympathique sucrerie en bonus : des appuis décalés pour déborder Tyrese Haliburton, puis un lancer lucide du ballon contre la planche pour lui-même, afin de dunker avec une facilité folle (une T-Mac pour les anciens).
« Il n’a pas de limite »
Le rookie de l’année 2024 a tout simplement détruit la raquette des Pacers, Myles Turner en tête (5/17 aux tirs et seulement 3 rebonds). S’il a surnagé en attaque (18 points à 7/10 aux tirs), Pascal Siakam s’inclut dans la faillite défensive du jour. « Depuis un mois, on avait l’une des meilleures défenses de toute la NBA, rapporte-t-il. Là on ne s’est tout simplement pas battus. Les Spurs faisaient ce qu’ils voulaient, ça n’était pas nous aujourd’hui. »
Dans le camp d’en face, on a par contre totalement reconnu le « Wemby » le plus kiffant qui soit, et malheureusement non retenu dans le cinq majeur à l’Ouest du All Star Game dévoilé la nuit dernière (il sera dans les remplaçants à coup sûr, pas de panique). « Il est très talentueux, il va arriver où il veut, il n’a pas de limite, a d’ailleurs appuyé le Camerounais d’Indiana, beau joueur sur le coup. Ce qu’il fait pour le moment, c’est quelque chose d’exceptionnel. »
Un sentiment partagé par les spectateurs de l’Accor Arena, pour qui il est cette semaine le centre du monde, ni plus ni moins, loin des préceptes accompagnant les sports collectifs. Venu des Pays-Bas, Floyd le reconnaît : « Je n’ai d’yeux que pour lui ce soir, j’aime beaucoup son jeu ». Elvis poursuit : « Oui, on a bien senti ce soir à quel point il était le chouchou. Il est très fort, humble… et français, c’est donc jackpot pour nous. On est contents et fiers de l’avoir en France, c’est de l’art ce qu’il fait ».
« Victor aime les projecteurs »
En dehors du terrain, c’est un grand oui. Et même sur le parquet de Bercy, « Wemby » a délivré un match « parmi ses cinq meilleurs au niveau de la performance pure » depuis son arrivée en NBA en 2023. Comment a-t-il pu assumer d’être à ce point sollicité toute la semaine, et de se retrouver MVP du match derrière, tout en enrayant une spirale de la lose (six défaites sur les sept précédentes rencontres de saison régulière ? Avec sur le dos son maillot bien sympa de Thierry Henry en équipe de France, : l’intérieur géorgien Sandro Mamukelashvili nous résume ça.
« C’est dur de jouer comme ça à la maison, avec tous ces gens venant pour vous. Il y a votre grand-mère, vos cousins, tout le monde vous regarde… Mais on voit que Victor se nourrit de la pression, il aime les projecteurs. Il veut juste jouer et s’amuser, il est venu et il a tout tué. »
Et avant tout l’honneur des Pacers, qui auront un -30 à se faire pardonner samedi (18 heures). Sidy Cissoko se joint au concert de louanges : « Victor, c’est un compétiteur hors normes, l’extraterrestre comme on l’appelle. C’est un grand plaisir de jouer avec lui. On savait qu’il allait sortir quelque chose de spécial, et il nous a fait un one man show ! » Mais comment, comment, comment ?
« Le spectaculaire viendra de lui-même »
« Du Kaaris et du Booba » partagés dans le vestiaire jeudi soir, mais pas que. « Je sais que pour rester dans ma bulle et faire un gros match, il faut que je me concentre sur les conseils et les consignes tactiques du coach, sur les efforts, sans tenter de faire quoi que ce soit d’incroyable. Au final, c’est la multiplicité des actions simples et collectives qui rendent le match incroyable. Le spectaculaire viendra de lui-même. » Oui, et il a tendance à s’inviter plus facilement dans les prestations de « Wemby » que dans nos rencontres de Départementale 2, on l’avoue.
Notre dossier sur Victor Wembanyama
Et même à chaud après ce premier NBA Paris Game de la semaine, notre jeune mature accepte volontiers de se prêter à une question sur l’image qu’il souhaitera laisser à la fin de sa carrière. « J’aimerais qu’on se souvienne de moi comme quelqu’un qui n’a pas pris de raccourcis, qui a gravi les bonnes étapes, pris les bonnes décisions, qui a été une personne loyale travaillant dur, mais aussi innovante. » Bon, en mode LeBron James, il reste vingt ans à notre phénomène pour pouvoir nous valider tout ça. Et récolter des wagons de « MVP, MVP, MVP » scandés à travers le monde comme jeudi soir.