L’Europe condamne la France sur le devoir conjugal, l’obligation d’avoir des relations sexuelles avec son époux
C’est sur une notion d’un autre temps qu’a été condamnée, ce jeudi, la France : le devoir conjugal. La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a estimé qu’une femme qui refuse des rapports sexuels à son mari ne doit pas être considérée par la justice comme « fautive » en cas de divorce. Les juges européens ont donc donné raison à une femme âgée de 69 ans qui refusait d’avoir des relations sexuelles avec son mari depuis huit ans… contrairement à la justice française.
La cour d’appel de Versailles en 2019 avait jugé légitime la demande de son ancien mari de divorce pour faute. Pourtant, l’épouse avait expliqué devoir s’occuper à temps plein de sa fille handicapée et qu’elle souffrait elle-même de graves problèmes de santé. Elle a également raconté que son refus d’avoir des relations sexuelles avait entraîné des violences verbales et physiques de son conjoint, rapporte Radio France.
« Devoirs et obligations du mariage »
Pourtant, le devoir conjugal ne figure plus dans loi française depuis la création du Code civil napoléonien en 1804. La justice a même intégré, en 1990, le droit de refuser des relations sexuelles à son conjoint. Elle a également retenu à plusieurs reprises la notion de viol conjugal si le partenaire imposait des rapports.
Pour autant, la notion de devoir conjugal n’a pas pour autant disparu de la jurisprudence. A titre d’exemple, en 2011, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait confirmé une décision de divorce aux torts exclusifs du mari pour cause d’absence de relations sexuelles pendant plusieurs années, explique La Croix. L’homme divorcé avait été condamné à verser 10.000 euros de dommages et intérêts à son ex-compagne.
« Une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage »
« La justice civile continue parfois de s’appuyer sur une interprétation de l’article 242 du Code civil, pour sanctionner un partenaire abstinent », explique Radio France. Cet article dispose que « le divorce peut être demandé par un époux pour des faits imputables à l’autre lorsque ces faits constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune. »
« J’espère que cette décision marquera un tournant dans la lutte pour les droits des femmes en France », a réagi la victime, dans un communiqué transmis par l’une de ses deux avocates, Lilia Mhissen.