Incendies de Los Angeles : « On a compris assez vite que ça allait être un feu très destructeur », les Français racontent
Dans la nuit de mardi à mercredi, les flammes ont ravagé plusieurs quartiers de Los Angeles, laissant derrière elles des scènes de désolation. Entre des vents violents qui ne faiblissent pas, une sécheresse persistante et des incendies qui progressent à une vitesse fulgurante, la situation est devenue critique dans certaines zones de la métropole Californienne.
Face à l’urgence, des milliers d’habitants ont été évacués, tandis que d’autres, restés chez eux, guettent l’évolution de la situation minute par minute. Parmi eux, des Français installés dans la région partagent avec 20 Minutes leur expérience d’une nuit marquée par la peur, la solidarité et l’incertitude.
« Il n’a pas plu ici depuis le 5 mai dernier »
Emma Hedgcock est coordinatrice numérique dans une école privée de Los Angeles. Elle se souviendra longtemps de cette journée. Ce mardi, la Française enseigne comme d’habitude, mais à 10 heures, une alerte tombe. « J’ai reçu un texto de la compagnie d’électricité m’indiquant une coupure dans mon quartier. »
Si Emma, qui a déjà vécu des feux spectaculaires en Californie, ne s’inquiète pas outre mesure, elle reste sur ses gardes car « Il n’a pas plu ici depuis le 5 mai dernier. On sait que ça peut aller très vite. » À ce moment-là, le vent souffle déjà très fort. L’école qui ne possède pas de cantine interdit à ses élèves et enseignants de déjeuner dehors comme ils en ont l’habitude. « Il a fallu improviser et on a fini par déjeuner à nos bureaux. »
Se préparer à une évacuation soudaine
Installée en Californie depuis 2016, Emma est bien consciente des risques liés aux incendies, mais cette fois-ci, l’atmosphère est différente. Les vents violents et la sécheresse rendent la situation encore plus inquiétante. Pour suivre les événements, elle se tourne vers l’application Watch Duty. « Elle fournit des cartes des zones touchées, indique la proportion de chaque feu sous contrôle et surtout les zones d’évacuation. »
À midi, la tension monte d’un cran à l’école. « La direction a demandé aux élèves de préparer leurs sacs en cas d’évacuation soudaine. » Les mythiques bus jaunes de ramassage scolaire arrivent plus tôt que prévu et certains élèves, habitant dans des zones à risque, comprennent vite la gravité de la situation.
« On s’attend à passer la soirée dans le noir »
Il est quinze heures et Emma quitte enfin l’école pour rejoindre son domicile. « On a pris tout ce qu’il fallait « au cas où ». C’était l’expression du jour. » Une fois chez elle, elle constate que l’électricité est revenue, mais de façon instable. « Ça sautait fréquemment, alors avec mon mari, on s’attendait à passer la soirée dans le noir. » La soirée prend une autre tournure lorsqu’un nouvel incendie se déclare à Pasadena, à seulement quelques kilomètres de leur maison. Coincée entre deux foyers actifs, Emma passe une nuit agitée. « Je n’ai pas très bien dormi, mais on va bien. Les vents sont encore violents ce matin. »
En plus du danger immédiat des flammes, l’air devient irrespirable. « Ce matin, en une heure, la qualité de l’air est passée de « mauvaise pour la santé » à « dangereuse ». » L’indice de pollution, qui atteint 302 sur une échelle allant de 0 à 500, illustre à quel point l’atmosphère est devenue toxique.
« On peut pas cacher le feu, les enfants sont inquiets »
Pour Paul Tanis, un papa franco-américain de deux enfants et habitant de Santa Monica, la nuit a été tout aussi éprouvante. Sur son compte Instagram, il a partagé chaque étape de cette nuit d’incertitude. « Il y a eu tellement de vent cette nuit. Je ne voulais pas être à 100 % dépendant des infos qui tombaient, alors j’ai pris la voiture pour aller voir l’état des choses jusqu’au pier de Santa Monica. Je voulais pouvoir décider s’il fallait partir ou non. »
Après quelques heures de surveillance, Paul et sa femme vont se coucher vers une heure du matin et finiront par s’endormir une heure plus tard. Mais la menace reste bien présente. Avec ses enfants, Paul doit jongler entre vérité et réassurance. « On ne peut pas cacher le feu. On voit les flammes de chez nous quand va les chercher à l’école. Les enfants sont inquiets. Pas facile de trouver les mots pour les rassurer. On leur a dit que c’était sous contrôle, même si ce n’est pas tout à fait vrai. L’objectif, c’est qu’ils dorment et se reposent. C’est notre job de nous inquiéter, pas le leur. »
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« Les sacs d’évacuation ne sont pas toujours prêts »
Face à l’urgence, la solidarité s’organise. Agnès Chareton est membre de l’association d’entrepreneures francophones Elles Collective. « Los Angeles est une ville immense. J’habite plus au sud, je suis en sécurité », explique-t-elle. Mais ce n’est pas pour autant qu’elle n’est pas concernée. Dans le groupe WhatsApp de l’association, les informations fusent. « On a été plusieurs à proposer des logements à nos amis pour éviter les centres d’évacuation. »
Agnès Chareton note également que, malgré l’habitude des incendies, la situation reste particulièrement effrayante cette année. « On a compris assez vite que ça allait être un feu très destructeur. Les gens ont beau être habitués, ça va tellement vite que c’est impressionnant. Les sacs d’évacuation ne sont pas toujours prêts. »