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Affaire de pédophilie : Pourquoi Elon Musk s’attaque-t-il au gouvernement anglais ?

Elon Musk a fait du gouvernement britannique sa nouvelle cible de harcèlement favorite. Il enchaîne les tweets, les interviews, pour appeler à « libérer » le peuple britannique du Premier ministre travailliste Keir Starmer, qu’il accuse de diriger un « Etat policier tyrannique ».

Un casse-tête pour le gouvernement, qui voit ce milliardaire caché de l’autre côté de l’Atlantique utiliser la peur croissante de l’immigration pour raviver des tensions déjà fortes dans le pays.

Dernière affaire en date déterrée par le milliardaire, un scandale d’agressions sexuelles, de viols et d’exploitation de mineurs vieux de plus de 20 ans qui à l’époque avait fait l’effet d’une bombe.

Un scandale de pédophilie mis sous le tapis

Entre 1997 et 2013, plus de 1 400 mineures ont été victimes d’abus sexuels, d’exploitation et de viols dans la ville de Rotherham, dans le nord-est de l’Angleterre. Des enfants qui étaient pour la majorité sous la protection des services sociaux de protection de l’enfance, accusés d’avoir fermé les yeux sur la situation et d’avoir ignoré plusieurs rapports alarmants. Une affaire alors largement relayée par les médias britanniques comme étrangers.

Laëtitia Langlois, maîtresse de conférences en civilisation britannique à l’université d’Angers l’affirme, cet épisode a bouleversé le Royaume-Uni : « Lorsque les Britanniques ont compris que ces viols avaient lieu depuis les années 80, il y a eu un mélange d’émoi, mais surtout de colère, lorsque ont été révélées les défaillances des services de protection de l’enfance et de la police ».

Selon la spécialiste, c’est la nationalité des agresseurs, en grande majorité pakistanais, qui était au cœur du scandale. « Il y avait une grande crainte dans ces villes d’attiser la haine contre des populations qui sont déjà discriminées ». Des centaines d’agressions, prises à la légère ou ignorées, pour éviter de raviver les tensions raciales qui se propageaient dans le pays. Une justification qu’a reprise Elon Musk, accusant la justice britannique de juger différemment les citoyens selon leur nationalité, et selon lui de juger encore plus sévèrement les hommes blancs britanniques.

Keir Starmer dans le viseur

En remettant cette affaire sur le devant de la scène, le milliardaire trouve aussi un moyen de s’attaquer directement à Keir Starmer, Premier ministre travailliste et cible régulière de Musk.

Entre 2008 et 2013, au cœur de l’affaire, Keir Starmer dirigeait le Service des poursuites judiciaires de la Couronne (CPS), un organe chargé d’assister les services de police lors des enquêtes pour définir les charges encourues et les potentielles peines. Il est donc accusé par le propriétaire de Tesla d’avoir été négligent, et en partie responsable de la souffrance de ces jeunes filles. Une critique facile pour Laëtitia Langlois : « Peu de gens savent vraiment en quoi consiste ce rôle, c’est simplement une manière de s’attaquer à lui. Il sait qu’il lui suffit de répandre des rumeurs de ce type pour mettre le feu aux poudres ».

La réponse du Premier ministre ne s’est pas fait attendre. Dans une conférence de presse ce lundi matin, Keir Starmer attaque frontalement son détracteur : « Ceux qui propagent mensonges et désinformation […] ne s’intéressent pas aux victimes. Ils s’intéressent à eux-mêmes ». Derrière la médiatisation de l’affaire, Elon Musk cherche surtout à diffuser ses idées d’extrême droite, anti-immigration et proches de la suprématie blanche.

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Musk n’en est pas à son coup d’essai

Ces dernières semaines, Elon Musk s’intéresse de près la vie politique britannique et critique les moindres faits et gestes du gouvernement. Il a notamment appelé à la libération du militant d’extrême droite Tommy Robinson, tête d’affiche des agressions anti-migrants de l’été dernier dans la même ville de Rotherham. Aujourd’hui incarcéré pour répétition de propos diffamatoires envers un réfugié syrien, le propriétaire de X voit en lui un « défenseur de la liberté d’expression », injustement enfermé.

Musk a aussi flirté quelques semaines avec le parti d’extrême droite Reform UK, et son dirigeant Nigel Farage. Le milliardaire avait d’abord promis de soutenir financièrement le parti, après une rencontre avec son dirigeant dans la maison de Donald Trump, avant de se rétracter il y a quelques jours, affirmant que Nigel Farage n’était pas le dirigeant qu’il fallait pour le parti Reform UK.

Un ping-pong qui ne surprend pas Laëtitia Langlois : « Les deux hommes sont en désaccord sur l’incarcération de Tommy Robinson. Musk voit en lui le défenseur de la liberté d’expression au Royaume-Uni, là où Farage y voit sûrement un potentiel adversaire politique, capable de le dépasser par la droite ». Comme souvent, un seul désaccord suffit pour devenir un ennemi d’Elon Musk.

Que cherche Elon Musk En Angleterre ?

Pour notre spécialiste, Musk, comme Steve Bannon à l’époque, cherche à fédérer les partis d’extrême droite européens autour de ses valeurs, d’anti-immigration, de « guerre contre le wokisme » et autres.

« Comme son prédécesseur, il a repéré le Royaume-Uni comme un pays où ses idées sont populaires, profitant en plus d’un contexte favorable où l’Europe tout entière est attirée par ce courant de pensée. »

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L’objectif : faire du pays une portée d’entrée avant de pouvoir influencer les autres partis européens.