Animation : Pourquoi « Samuel », la série phénomène d’Arte, fait un carton ?
Un petit bijou qui cumule d’ores et déjà 40 millions de vues toutes plateformes confondues ! Samuel, série courte d’animation en 21 épisodes, créée par Emilie Tronche, raconte le quotidien d’un écolier de CM2. Discrètement lancée en mars sur la plateforme d’Arte.tv, Samuel, diffusée à l’antenne d’Arte ce lundi à 20h50, est déjà devenue culte sur les réseaux sociaux. Anatomie d’un succès.
Un portrait juste des vicissitudes de l’enfance
Cette série dépeint le quotidien tendre et sensible de Samuel, un écolier de CM2 sur le point de passer en 6ᵉ, à travers son journal intime, lu à haute voix. « Salut, je m’appelle Samuel, j’ai 10 ans et j’ai un problème. Mais bon, j’ai pas trop envie d’en parler », confesse-t-il au début de la série.
« J’ai représenté l’enfance comme moi je la connaissais, en essayant d’être le plus sincère possible. Ça fait partie peut-être des thèmes universels de ceux où on peut s’identifier au personnage », analyse Emilie Tronche dans les colonnes du HuffPost.
Au fil des épisodes, Samuel décrit avec justesse les vicissitudes de l’enfance : son amour secret pour la « grande Julie », son amitié avec Corentin, le copain aux cheveux gras, sa détestation de Dimitri, dont toutes les filles sont éprises, car il court très vite et se la pète, le décès d’un grand-parent ou la dépression d’un parent. Qu’on ait 10, 20 ou 50 ans, ce portrait de l’enfance touche en plein en cœur !
Un graphisme minimaliste plein de poésie
Le trait noir sur fond blanc d’Emilie Tronche, dessinatrice, autrice et interprète des voix de cette série, semble d’une simplicité enfantine. Ce style dépouillé, mais rythmé, qui rappelle Les Cahiers d’Esther de Riad Sattouf, permet pourtant de faire passer toute la mélancolie, la drôlerie et la poésie de la série.
« Samuel est en animation 2D, avec douze dessins par seconde. Il fallait que ça aille vite, d’où cette ligne noire sur fond blanc, très simple. Ce côté croquis, un peu brut, permettait de transmettre l’émotion, de dire ce que je voulais avec peu de chose, par exemple en jouant sur les yeux, les regards », explique la créatrice dans le dossier de presse de la série.
Le tout est sublimé par une bande originale bien sentie où se croisent des morceaux d’époque (Abba, Giorgio Moroder, etc.) et contemporains (L’Impératrice, November Ultra, etc.). « La musique […] permet à Samuel de transmettre ses émotions. Elle est indissociable de la narration. D’ailleurs, la quête des droits musicaux est devenue une saga en soi », souligne Emilie Tronche.
Ces morceaux servent des chorégraphies, souvent enchanteresses, d’ores et déjà cultes sur TikTok. « La musique et la danse ont aussi été là tout de suite parce qu’elles sont omniprésentes dans ma vie », poursuit la créatrice. Et d’expliquer : « Samuel danse souvent : quand il est heureux, quand il est désespéré, quand il ne sait pas trop ce qu’il ressent, quand c’est trop pour lui ou qu’il n’a pas les mots. »
Une nostalgie pas édulcorée
La série se déroule en 2006. Samuel est ainsi truffé de références et de clins d’œil aux millennials : les premières dragues sur MSN, le trafic de feuilles Diddl dans la cour de récréation ou encore l’épidémie de franges emo causée par Tokio Hotel.
En jouant sur des repères communs à bon nombre d’entre nous, Samuel fait ressurgir des souvenirs au doux goût des années 2000 sans céder à la nostalgie édulcorée.
Un format adapté à l’ère des réseaux sociaux
Samuel cumule plus de 5.5 millions de vues sur arte.tv, 7.5 millions de vues sur YouTube, plus de 13 millions de vues sur Instagram (comptes ARTE à suivre et ARTEfr) et 14 millions de vues sur TikTok, selon les chiffres d’Influencia.
Le format de la série Samuel est parfaitement adapté aux réseaux sociaux. « Il n’y a pas une, mais deux séries distinctes, explique Marianne Levy-Leblond, directrice de l’unité créations numérique d’Arte France à nos confrères de l’ADN. La première en format horizontal est plus un feuilleton qui se regarde sur YouTube, Instagram et sur notre plateforme. La seconde met en scène des instantanés surtout visibles sur TikTok. L’idée était de proposer des épisodes capsule qui ne dévoilent rien de l’intrigue et qui se centrent sur la musique ou sur la danse, afin de respecter les codes de la plateforme. »
La série a ainsi engendré de nombreuses conversations sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok avec des reprises des chorégraphies de Samuel partout dans le monde. Sur Instagram, la série est devenue le thème d’un challenge « inktober ». La communauté des fans de Samuel est très active avec des serveurs Discord dédiés, des fanfictions et des théories sur la psychologie des personnages (et particulièrement sur Bérénice, la camarade de classe en colère de Samuel, vue comme une préado lesbienne qui n’a pas encore fait son coming out).
La série cartonne tellement que le studio de production Les Valseurs propose, à l’occasion de la mise à l’antenne de la fiction, une boutique éphémère avec du merchandising à l’effigie des petits héros de Samuel dans le Marais (Paris) jusqu’au 21 décembre et une exposition de dessins inédits d’Emilie Tronche au Centre Pompidou.
Samuel, c’est 21 épisodes de cinq minutes, et bien plus à l’avenir. La série a été adaptée en Espagne, un roman graphique est en cours de préparation, et Emilie Tronche n’est pas fermée à l’idée d’une saison 2 : « L’âge qui m’intéresserait, ce serait vraiment un an plus tard. Par rapport à la fin de la série, je pense à la quatrième-cinquième, parce que le collège ça peut être dur », confie Emilie Troche au Huffpost.