« Elle se victimise »… La lycéenne voilée qui a frappé une enseignante à Tourcoing condamnée à quatre mois de sursis
Warda H., l’élève du lycée Sévigné de Tourcoing accusée d’avoir giflé une enseignante qui lui avait demandé de retirer son voile islamique, était jugée, ce mercredi, devant le tribunal judiciaire de Lille. Âgée de 18 ans, la jeune fille devait répondre de « violences et de menaces de mort sur une personne chargée de mission de service public ».
Deux mois après les faits, l’intérêt autour de ce dossier n’est pas retombé si l’on en croit la salle d’audience comble et la présence de nombreux médias plusieurs minutes avant le début de l’audience. Un intérêt que dénonce l’avocat de la défense d’un côté, et que celui de la victime compte exploiter de l’autre.
« Fait de société » ou « affaire normale »
Pour maître Eric Cattelin-Denu, avocat de l’enseignante, le fond du problème est bien le non-respect de la laïcité par une prévenue qu’il qualifie de « petit dictateur » tentant d’instaurer « le début d’un petit khalifat ». S’il se défend de faire de la politique à la barre, celui qui était candidat du RN aux municipales de 2020 à Lille, martèle que « c’est un fait de société qu’on juge » dans une « société pleine d’atteintes à l’autorité » qui « perd son identité et ses valeurs » . Et de comparer cette affaire aux assassinats de Samuel Paty et Dominique Bernard, enjoignant la présidente du tribunal à prononcer une « peine exemplaire » pour « protéger les autres face à un islamisme montant et conquérant ».
En face, Ossama Dahmane, avocat de Warda H. estime au contraire que ce « dossier très simple » doit être jugé comme une « affaire normale ». Pour lui, « la laïcité n’a pas été respectée 45 secondes » et il est « caricatural et excessif » de juger sa cliente « comme si elle était responsable de tous les maux de la société ». Il admet que les seules choses qui peuvent être reprochées à la prévenue, ce sont les regrettables violences envers l’enseignante, même s’il conteste la gifle et les menaces de mort.
A l’audience, personne ne conteste que la prévenue a effectivement retiré son voile lorsque l’enseignante le lui a demandé. Certes, l’injonction l’a énervée, lui laissant échapper un « ça fait chier ». Tous s’accordent aussi à dire que les choses ont dérapé parce que la jeune fille refusait de rester dans le lycée et de livrer son identité à l’enseignante. C’est sur la suite que les points de vue divergent, l’élève niant avoir porté une gifle à la victime. Sauf que la vidéosurveillance du lycée, diffusée à l’audience, montre le contraire. « Si on ne voit pas la même chose sur la vidéo, c’est que vous voyez mal », lance la procureure à Warda H.
Une peine au-delà des réquisitions
Une mauvaise foi que la victime ne digère pas. La voix chevrotante, l’enseignante fulmine : « Elle se victimise et ment jusqu’à nier sa gifle alors que moi, on a voulu me faire passer pour une islamophobe et que je suis sous cachetons pour aller bosser ». Et face au désarroi de la prof, Warda H. ne moufte pas. « Ça ne vous fait ni chaud ni froid ? », lui demande la présidente. « Je n’ai rien à dire sur des choses que je n’ai pas faites », répond-elle laconiquement.
En ce qui concerne la laïcité à l’école, la procureure rappelle dans son réquisitoire que la « loi s’applique à tous », et ce, « qu’on la comprenne ou pas ». Pour autant, elle reste mesurée dans ses réquisitions et réclame comme peine 140 heures de travail d’intérêt général.
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Sauf que le tribunal ira bien au-delà dans sa décision. Reconnaissant coupable Warda H de l’intégralité des faits qui lui étaient reprochés, la présidente a prononcé à l’encontre de Warda H. une peine de quatre mois de prison avec sursis probatoire et l’obligation d’effectuer un stage de citoyenneté. « C’est un message de soutien aux enseignants et un avertissement pour ceux qui voudraient s’attaquer aux profs », se félicite maître Cattelin-Denu. De son côté, maître Dahmane dénonce « un tribunal qui a voulu couper la poire en deux pour justifier une procédure démesurée ».