« Quand tu es enceinte, tout le monde se permet de donner son avis », constate l’illustratrice Jessica Fauveau
Après avoir exploré les joies, les soirées arrosées et les angoisses de la trentaine, Jessica Fauveau se penche sur d’autres festivités et nuits blanches : celles de la maternité. Suivie par plus de 340.000 abonnés sur Instagram (avec ses comptes @latrentainetmtc et @ladaronietmtc), l’illustratrice présente Bienvenue en Daronnie (Albin Michel), « un guide pour dédramatiser et rigoler des petits tracas et grands bouleversements de la parentalité ».
Elle y raconte avec humour son quotidien de jeune maman, ses heures de sommeil sacrifiée, ses triples doses de café et ses teeshirts mouchetés de régurgitations de bébé. Elle dévoile aussi ses conseils et ses punchlines pour répondre aux conseils non sollicités que reçoivent les jeunes parents de leur entourage. Mais toujours avec malice et autodérision. Elle a répondu aux questions de 20 Minutes.
L’arrivée d’un bébé vous a-t-elle fait basculer radicalement dans un nouveau monde ?
Le côté obscur de la Force, un monde que je ne connaissais pas du tout. J’avais des copines qui étaient devenues maman donc j’avais une vague idée de ce à quoi ça ressemblait, mais tant que tu n’as pas mis un pied dedans, tu ne peux pas trop évaluer le tsunami que c’est. C’est aussi tout un nouveau monde pour faire des blagues. Ma fille et la parentalité sont une source d’inspiration intarissable, au quotidien. Je ne connais plus trop les situations de célibataires teufeuses en ce moment, mais j’en ai plein d’autres.
Dans vos dessins, vous comparez souvent votre vie actuelle à celle d’avant. Êtes-vous nostalgique de l’insouciance d’autrefois ?
Pour être honnête, pas du tout. J’ai énormément kiffé ma vie d’avant, j’ai bien profité du célibat, j’ai voyagé, j’ai beaucoup fait la fête et j’ai adoré. Mais j’aime vraiment tout autant ma vie maintenant, c’est juste qu’elle est très différente. Parfois, je suis contente quand les grands-parents prennent le bébé un week-end et que je peux avoir de nouveau un peu d’insouciance mais ça ne manque pas du tout.
Le manque de sommeil, les tâtonnements, les bouleversements au sein du couple… Qu’est-ce qui vous a paru le plus difficile en devenant parent ?
Le manque de sommeil, de manière incontestable. C’est super dur à gérer parce que ça a un impact sur tous les autres pans, notamment ta vie de couple. Tu es à cran, tu as tendance à te prendre plus la tête pour des conneries et tout est un peu plus dur au quotidien. A partir du moment où le bébé commence à bien dormir, d’un coup tu vois la sortie du tunnel. Ce que j’ai aussi trouvé très difficile au début, c’est faire vivre cette étiquette de maman avec tout le reste, ne pas perdre de vue la femme que tu es, ton travail… C’est la difficulté de garder un équilibre en ajoutant ce rôle qui prend énormément de place.
Est-ce plus difficile de rire de ces sujets ?
Ce qui est chouette avec Instagram, c’est de se rendre compte que la plupart des gens passent par là. Rigoler avec eux du fait de ne pas dormir, d’être au bout du rouleau… Ça devient drôle parce qu’en fait, 500 personnes ont passé la même nuit de merde que toi. On tourne en dérision le fait d’avoir des maxi cernes, d’être des zombies et ça devient quelque chose de plus solidaire. Tu te sens moins seule.
Votre compte contraste aussi avec ceux des « mamans influenceuses » sur les réseaux sociaux qui peuvent un peu plomber le moral…
Les mamans canons, de retour au taf deux jours après l’accouchement alors que toi tu peines à aller te doucher et petit-déjeuner avant 15 heures ! Celles qui font les lutins de Noël tous les jours et trois heures de repas fait maison tous les soirs, pendant que toi tu galères. J’ai arrêté de les suivre très vite car si ça te fait juste te sentir mal, ce n’est pas utile. Ce n’est pas leur volonté mais c’est un peu l’aspect négatif des réseaux et ça peut être désagréable à voir.
Les abonnés qui vous ont connu avec vos chroniques sur la trentaine vous ont-ils suivi dans cette nouvelle aventure de la parentalité ?
Il y a quelques récalcitrants qui ne restent que sur la trentaine et ne veulent pas bouger, mais sinon, oui. Et notamment des gens qui n’avaient pas d’enfants, pas le projet d’en avoir tout de suite, ou pas du tout, mais qui aiment bien mon humour et me suivre dans mes aventures. Ça permet aussi à celles et ceux qui ne veulent pas d’enfants de comprendre leurs potes qui en ont et ce qu’ils vivent.
Votre guide « Bienvenue en Daronnie » s’adresse-t-il uniquement aux jeunes parents ?
Ça peut intéresser d’autres gens, par exemple, je trouve ça intéressant de le filer aux grands-parents pour qu’ils voient un peu ce que tu vis et comment ça se passe aujourd’hui. Ça crée un petit pont intergénérationnel. Mais concrètement, c’est vraiment le guide que j’aurais aimé lire enceinte pour me sentir moins seule et comprendre ce qui allait m’arriver.
Un guide qui tranche pas mal avec tous les livres traditionnels très didactiques sur le sujet.
Il y a des centaines de livres et tu ne sais pas par où commencer. J’en ouvrais un et je me sentais déjà mauvaise daronne alors que je n’étais pas encore mère. Je voulais quelque chose de plus léger, illustré, pour m’aider à me frayer un chemin, sans me sentir mal. Le but était de faire déculpabiliser et rire les futurs parents. Il y a quand même des côtés explicatifs et pédagogiques sur le mommy brain, les hormones… Et si tu as vraiment envie de creuser un sujet, tu achètes un autre bouquin plus spécifique.
Vous plaisantez sur les nombreux conseils non sollicités que reçoivent les jeunes parents. Comment les avez-vous vécus ?
Très mal. Quand tu es enceinte, tu tombes un peu dans le domaine public, tout le monde se permet de donner son avis sur ce que tu vas faire, sur ton apparence, sur ton bébé… Je ne m’y attendais pas. Et quand tu accouches, tu tâtonnes, tu cherches un peu quoi faire. Tout le monde t’envoie des critiques dans la tronche et tu ne sais pas quoi répondre. Le but est d’avoir des punchlines pour répondre à Tata Monique quand elle t’envoie un petit taquet sur l’allaitement ou le cododo.
Il y a aussi énormément d’anecdotes cocasses. Vivre avec un bébé, c’est aussi plein de moments joyeux ou improbables ?
Ma fille a un an mais on se tape déjà des barres avec elle tous les jours, c’est un vrai petit clown. Quand tu la vois évoluer et apprendre des mots hyper drôles, des petites bourdes ou même juste dans les rires au quotidien, ça apporte une joie immense.
Ce livre raconte aussi sa vie. Vous aimeriez qu’elle le lise plus tard ?
Je n’ai toujours pas fait son livre des 1 an en photos, je procrastine et j’ai très mauvaise conscience… Mais au moins si je ne le fais jamais, elle aura un bouquin en souvenir. Elle pourra le lire aussi si elle veut devenir daronne. Et ensuite, il va y avoir le « terrible two », l’arrivée d’un 2e, le « threenager »… J’en ai pour 4-5 ans de contenus, facile ! Puis après, la crise d’adolescence… Il y a de quoi faire.