France

Procès des viols de Mazan : « On vit dans une société qui banalise le viol », affirme Judith Godrèche

A l’occasion du 25 novembre et de la lutte contre les violences faites aux femmes, Judith Godrèche était à Lyon mardi soir pour présenter son court métrage Moi aussi, invitée par la métropole et l’association Femmes ici et ailleurs, à l’institut Lumière. En février dernier, lorsqu’elle a dénoncé les viols qu’elle a subis en portant plainte contre Benoît Jacquot, l’actrice et réalisatrice a reçu plus de 5.000 messages en quinze jours de personnes à qui il était arrivé la même chose. Devenue une icône dans ce combat, l’artiste a voulu « rendre hommage » à ces témoignages à travers ce film.

Depuis début septembre, Judith Godrèche rend régulièrement hommage à une autre femme dans ses posts Instagram ou dans ses discours : Gisèle Pelicot, droguée par son ex-mari et violée par plus de 80 hommes pendant une dizaine d’années à son domicile de Mazan.

Lors de la projection du court-métrage à Lyon, de nombreuses personnes ont noté « des liens entre ce film et ce procès ». La comédienne est revenue pour 20 Minutes sur cette affaire et ce que l’histoire de Gisèle Pelicot dit de la société française.

Quel lien pouvez-vous faire entre votre histoire et celle de Gisèle Pelicot ?

Même si je n’ai pas subi la soumission chimique, j’ai été sous emprise. C’est la question du consentement qui est au cœur du sujet. Tout s’entremêle. Ce que dit l’histoire de Gisèle Pelicot, et ce qu’elle dit elle-même, c’est qu’on ne peut plus tourner la tête face à cette réalité : on vit dans une société qui banalise le viol.

Qu’est-ce que représente Gisèle Pelicot pour vous ?

Grâce à son courage de lever le huis clos sur le procès, les médias se sont emparés de son histoire. Il faut continuer de relayer et de publier ses mots à l’infini. Je la cite à nouveau : « Il est grand temps que la société machiste et patriarcale qui banalise le viol change. Il est temps qu’on change de regard sur le viol. »

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Que nous dit ce procès de la société ?

Il nous dit qu’on ne peut plus faire semblant de ne pas savoir ce qu’il se passe. On ne peut plus nier cette vision qu’ont les hommes sur les femmes et tous ces rapports de pouvoir qu’ils exercent sur elles. J’ai pourtant le sentiment qu’il y a encore une résistance face à cette réalité-là. Il y a un réel problème patriarcal dans notre pays qui n’est pas près de se résoudre.

Pourquoi ?

La société n’est malheureusement pas en train de changer. Ce n’est pas parce qu’on assiste à ce procès et qu’on entend cette femme nous dire qu’il faut que la société machiste et patriarcale change qu’elle est en train de le faire.

On le remarque dans les annonces du gouvernement du 25 novembre. On ne parle pas de « violences systémiques » qui se passent dans notre « société patriarcale ». Aucun de ces mots, jamais, n’est prononcé par nos politiques censés représenter notre population.

Qu’avez-vous pensé des mesures annoncées par Michel Barnier ?

Je n’ai pas entendu ce que je voulais entendre. Il sera désormais possible de porter plainte dans les hôpitaux. Très bien. Mais où sont les effectifs ? Les associations féministes l’affirment chaque année : il y a un énorme besoin d’argent [2,6 milliards d’euros] pour recueillir la parole et prendre en charge les victimes, mais aussi pour faire de la prévention, de la sensibilisation à propos des violences sexistes et sexuelles. Pour l’instant, la réponse politique n’existe pas.

En savoir plus sur les violences sexistes et sexuelles

J’ai envie de demander : Michel Barnier, avez-vous entendu ce qu’a dit Gisèle Pelicot ? Elle n’a pas demandé des « mesures à titre expérimental », elle a dit que nous étions dans une société « patriarcale et machiste qui doit changer ». C’est donc ça que le Premier ministre aurait dû dire. Il faut prendre mot pour mot ses propos, dire qu’on l’a entendue et comprise pour faire évoluer les choses. La révolution que Gisèle Pelicot demande ne va pas se faire avec ces mesurettes.