Violences sexistes et sexuelles : A la faculté de médecine de Strasbourg, « on se bat pour que ça change »
Le chiffre a de quoi interpeller. D’après une étude, une femme sur deux dit avoir été victime de violences sexistes et sexuelles dans le milieu médical. L’enquête, menée par le Conseil national de l’ordre des médecins (Cnom) et publiée le 20 novembre, a été menée auprès de 21.140 médecins.
Surprenant ? « Non. On a beaucoup entendu parler de ces problèmes et il y a beaucoup de prévention sur le sujet », répond Marie, étudiante en troisième année à la faculté de médecine de Strasbourg. Un discours qui se retrouve chez toutes les futures blouses blanches interrogées ce jeudi matin sur place.
« En chirurgie, les hommes se croient supérieurs »
« Je n’ai pas eu affaire à des cas de misogynie. J’ai l’impression que de petites règles se sont mises en place pour calmer tout ça. Je n’ai jamais eu de souci », appuie Andréa, qui a choisi la cardiologie. L’externe de 5e année nuance toutefois un peu : « des copines ont déjà été dérangées par certains comportements. Des remarques, des avances pas souhaitées… Mais jamais de gestes déplacés. » Comme Andréa, plusieurs citent des réflexions à l’hôpital, où les rapports de domination restent omniprésents. Entre les professions mais aussi à l’intérieur où différents statuts existent. « En chirurgie, beaucoup d’hommes se croient supérieurs. J’ai déjà entendu un chirurgien se permettre de rabaisser son interne femme, se souvient Marie. Ça arrive surtout avec les femmes. »
Parfois même, et c’est moins attendu, entre elles. « En première année, on a fait un stage infirmier et j’ai été bien moins bien accueillie, témoigne Jeanne. Quand mes amis garçons étaient vus comme les futurs médecins, les filles étaient plutôt celles qui faisaient n’importe quoi, ne savaient rien faire, etc. »
« Dans ma promo, on est 80 % de filles donc… »
Toutes citent des exemples hors de la faculté de médecine. Un lieu épargné par les violences sexistes et sexuelles ? « On se bat pour que ça change », lance une étudiante sans développer « par peur de dire n’importe quoi ». « Dans ma promo, on est 80 % de filles donc ça limite les éventuels problèmes », sourit Andréa, loin d’être seule dans ce cas. Longtemps masculine, sa (future) profession s’est largement féminisée ces dernières années. De quoi changer l’ambiance dans les amphis mais aussi en soirées. Là encore, les comportements se seraient nettement assagis, sous la menace de sanction.
« Il y a des systèmes mis en place, les “trusted people”. En gros, c’est un dispositif avec des numéros affichés partout dans la soirée et si jamais il y a un souci de comportement, on peut appeler. La personne est là et peut intervenir tout de suite », détaille Marie, totalement rassurée. « Il n’y a plus du tout de bizutage, appuie Evan. C’est festif mais je n’ai jamais vu de dérapages. Et je ne rate pas une fête ! »
Quelques traditions perdurent néanmoins. « Ce n’est jamais obligatoire, précise Jeanne. Comme avec le chant du Limousin où, si quelqu’un le lance, on doit se déshabiller. On peut dire non mais ça peut être mal vu. »
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« Les mentalités ont beaucoup évolué. Grâce à la prévention et aux réseaux sociaux qui ont permis de libérer la parole et donc de limiter certains comportements, résume une rhumatologue sortie d’études depuis moins de dix ans. Le milieu carabin était très masculin et libéré, avec parfois des blagues de mauvais goût, mais maintenant ça ne passe plus. Pas avec la génération actuelle et c’était déjà le cas avec la mienne. »