Procès du RN : Darmanin, Zemmour, Estrosi… Pourquoi des adversaires de Marine Le Pen s’opposent à une inéligibilité
C’est une bombe qui pourrait bouleverser le paysage politique français. Le parquet a requis mercredi soir cinq ans de prison, dont deux ans ferme aménageables et 300.000 euros d’amende, contre Marine Le Pen dans le procès des assistants parlementaires du Rassemblement national. L’accusation a aussi requis cinq ans d’inéligibilité, assortie d’une exécution provisoire, qui aurait pour effet de rendre applicable la peine même en cas d’appel.
Si le tribunal suit le parquet, la triple candidate à la présidentielle ne pourrait donc pas se représenter en 2027. Ses soutiens ont – sans surprise – dénoncé un « acharnement » contre la cheffe de file de leur mouvement et une « atteinte à la démocratie ». Mais l’ex-patronne du parti a également reçu des soutiens plus inattendus de la part… de ses adversaires politiques.
« Combattre Marine Le Pen dans les urnes »
Si de nombreux élus RN ont publié sur X des photos d’eux avec Marine Le Pen sous le hashtag #JeSoutiensMarine, Gérald Darmanin n’est pas allé jusque-là. Mais l’ancien ministre de l’Intérieur a indiqué qu’il « serait profondément choquant que Marine Le Pen soit jugée inéligible et, ainsi, ne puisse pas se présenter devant le suffrage des Français ». Son argument ? Il juge préférable de « combattre Madame Le Pen […] dans les urnes, pas ailleurs. Si le tribunal juge qu’elle doit être condamnée, elle ne peut l’être électoralement, sans l’expression du Peuple. N’ayons pas peur de la démocratie et évitons de creuser, encore plus, la différence entre les »élites » et l’immense majorité de nos concitoyens », a-t-il indiqué.
Le maire de Nice, Christian Estrosi, dit peu ou prou la même chose : elle « doit être défaite dans les urnes, pas dans les prétoires. Si elle doit être condamnée, qu’elle le soit, mais qu’on n’empêche pas le débat démocratique ».
Même tonalité chez Eric Zemmour, généralement pas tendre avec sa rivale. « Si Marine Le Pen était déclarée inéligible, on atteindrait alors un niveau sans précédent dans le gouvernement des juges. Quels que soient nos désaccords, ce n’est sûrement pas à la justice de décider de qui peut être candidat à l’élection présidentielle », a estimé le président de Reconquête sur X.
Une loi votée par les parlementaires
Plusieurs élus ont pourtant rappelé sur les réseaux sociaux que cette décision judiciaire se fondait bien sur « la loi française », comme le dit l’ex-macroniste Sacha Houlié. Une loi qui a donc été votée par des parlementaires élus par les Français. Christian Estrosi a d’ailleurs demandé à ce que « le Parlement se saisisse sérieusement de l’automaticité des peines d’inéligibilité. C’est un principe dangereux, qui ampute le débat démocratique ».
Très attendue, la décision du tribunal, qui pourrait stopper la carrière politique de Marine Le Pen, ne sera pas connue avant plusieurs mois.