Enfants maltraités : Près de 50.000 « mots » déposés en un an… Quel bilan pour les boîtes aux lettres Papillons ?
En un an, près de 50.000 enfants ont déposé un mot dans une boîte aux lettres Papillon, installée dans les écoles et clubs de sport, afin de « confier les violences dont ils sont victimes », révèle l’association dans un communiqué mardi.
A quoi servent ces boîtes aux lettres ? Quel est le bilan de l’année scolaire 2023-2024 ? Quelles sont les tendances observées ? 20 Minutes fait le point.
C’est quoi les boîtes aux lettres Papillons ?
L’association Les Papillons a été fondée en octobre 2018 par Laurent Boyet. Son but est de « libérer la parole » à travers des boîtes aux lettres déployées dans les écoles et les clubs de sport depuis mars 2020. Elles permettent aux enfants de « s’exprimer librement sur les violences qu’ils subissent, donnant ainsi l’alerte et permettant une intervention rapide et appropriée ».
Les témoignages récoltés dans ces boîtes sont examinés par des psychologues qui peuvent effectuer des informations préoccupantes ou si le danger est grave et imminent, aviser directement le procureur de la République, a indiqué le fondateur de l’association à France Info. Grâce à cette initiative, Lily, 10 ans, a dénoncé en juin 2022, son grand-père incestueux, ce qui a permis son jugement devant la cour criminelle de l’Ain. A l’issue de son procès, le 23 septembre 2024, il a été condamné à douze ans de réclusion criminelle. « Le premier procès Papillons a montré à tout le monde que notre dispositif fonctionne », écrit l’association.
« Régulièrement, des bénévoles de l’association profitent de créneaux dans le temps périscolaire, pour sensibiliser les enfants à ce dispositif, précise l’association. Parallèlement, une personne « ressource », désignée par la mairie, est formée. Cette dernière récupère les courriers déposés, deux fois par semaine et les adresse au Pôle d’analyse des courriers Papillons, composé de deux psychologues salariées de l’association. Ces personnes apprennent à détecter les signaux de maltraitance et recueillir la parole des enfants. »
Quel bilan pour l’association Les Papillons en 2023-2024 ?
En 2023, 277 boîtes ont été installées dans toute la France. Selon l’association, 49.595 enfants ont déposé un mot dans une de ces boîtes aux lettres. Toujours d’après les données de la structure, une boîte aux lettres permet, en moyenne, d’atteindre 179 enfants.
Dans son communiqué, l’association précise que 94,8 % des mots entraînent un avis aux chefs d’établissement : « C’est systématiquement le cas pour les mots de harcèlement scolaire, ou d’incivilités ainsi que les mots qui parlent de violences physiques, de faits à connotation sexuelle (harcèlement sexuel, gestes déplacés…). » Elle rappelle que l’ensemble des mots reçus sont détruits après leur traitement.
Parmi ces près de 50.000 mots reçus, 2,4 % ont entraîné des « informations préoccupantes » adressées par mail aux cellules dédiées (CRIP) de l’association. Pour 1,4 % des mots analysés par le Pôle spécialisé des courriers Papillons, un signalement au procureur de la République a été fait « en raison du danger grave et immédiat encouru par les enfants », indique l’association dans son communiqué.
Quelles tendances ont été observées après les mots reçus d’enfants maltraités ?
D’après les données récoltées par l’association, ce sont les enfants âgés de 8-9 ans qui écrivent le plus dans ces boîtes, représentants 36,5 % des mots reçus. Toujours selon les analyses des Papillons, ce sont en majorité – 63 % des mots reçus – les jeunes filles qui confient les violences qu’elles subissent.
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Que racontent ces mots ? Pour 76,5 % d’entre eux, ils dénoncent des situations qui se déroulent en milieu scolaire : 27,3 % subissent des incivilités, 21,1 % du harcèlement scolaire, 20,3 % des violences physiques et 5,2 % des situations de violences sexuelles, « allant du harcèlement sexuel, aux attouchements et au viol », indique le communiqué. Les maltraitances subies dans le cadre familial représentent 9,2 % des situations dénoncées via ces boîtes aux lettres avec 54,3 % qui concernent des violences physiques, 7,6 % des violences psychologiques et 12,1 % des mots abordent des violences sexuelles intrafamiliales.
« Ces chiffres sont l’exacte photographie des violences subies par les 50.000 enfants qui, au cours de l’année dernière, ont eu accès à une boîte aux lettres Papillons », conclut le communiqué.
L’association invite à « tout mettre en œuvre » pour « continuer à préciser ces chiffres » pour que « tous les enfants puissent écrire ce qu’ils ne peuvent pas dire ». « Et pour que nous puissions mieux connaître et mieux accompagner les violences qu’ils subissent », écrit-elle.