France – Nouvelle-Zélande : Pourquoi la France espère de nouveau peser dans les instances internationales
Avant même sa réélection comme président de la Fédération française de rugby (FFR), le 19 octobre, Florian Grill imaginait déjà un « alignement des planètes », avec de nouveaux succès au niveau des Ligues régionales, le 2 novembre, puis de World Rugby, le 14 novembre.
L’ancien 2e ou 3e ligne international Abdelatif Benazzi, qui s’est déclaré le 8 septembre dans Midi Olympique, est en compétition avec l’Italien Andrea Rinaldi et l’Australien Brett Robinson pour diriger l’ovalie mondiale, à la place de l’Anglais Bill Beaumont, en poste depuis 2016 et qui, après deux mandats, va laisser son fauteuil. Vice-président de l’instance et grand favori à la succession de Beaumont, l’Ecossais John Jeffrey a jeté l’éponge courant septembre, après avoir été lâché par sa propre Fédération.
Aucun risque que pareille mésaventure arrive à Benazzi (56 ans), vice-président de la FFR délégué à l’international, qui se pose en héritier d’Albert Ferrasse (1979-1987) et Bernard Lapasset (2008-2016), les deux premiers Tricolores à avoir régné sur le rugby mondial. « La France doit reprendre du poids à l’international, avec la candidature d’Abdel Benazzi », affirme Florian Grill, qui avait déjà fait de ce thème l’un de ses principaux chevaux de bataille voici un an, en pleine Coupe du monde organisée dans notre pays.
Géant économique, « nain » politique
Alors que le rugby français est un géant économique au niveau mondial, que le puissant Top 14 attire les meilleurs joueurs, la voix de Paris peine pourtant à se faire entendre face aux Anglo-Saxons et aux « Sudistes », comme l’a illustré la récente polémique autour du carton rouge de 20 minutes.
« « Depuis des années, la France est quasi inexistante au niveau de World Rugby, résume Jean-Marc Lhermet, le bras droit de Florian Grill. Il y a une vingtaine de commissions qui travaillent sur les évolutions de notre sport, que ce soit au niveau de la formation, du haut niveau, du rugby à VII, des règles… La première chose a été de mettre des représentants du rugby français dans ces commissions-là. Et maintenant, on veut avoir du poids au niveau de la gouvernance car au bout du bout, quand le travail est fait dans les commissions, il doit être validé par la gouvernance. Là aussi, il doit y avoir un poids français plus important, d’où la candidature d’Abdelatif Benazzi. » »
Benazzi, comme Grill et Clotilde Delbos, désormais trésorière de la FFR, siègent au conseil de World Rugby, sorte de gouvernement où chaque grande puissance dispose de trois sièges (sans compter le président ni le vice-président). Mais au niveau des commissions, c’est le désert, ou presque. Le trombinoscope est vite dressé : Jérémie Lecha (commission du rugby professionnel), Abdelatif Benazzi (commission des règlements), Jade Ulutule (commission du rugby à VII haute performance et commission des athlètes de rugby) et Yann Roubert (commission consultative des Ligues professionnelles).
La FFR remontée contre World Rugby et ses orientations
Pas l’ombre d’un(e) Frenchie en revanche parmi le puissant comité exécutif, qui élabore et met en place la stratégie de World Rugby, pas vraiment tournée vers la philanthropie, et joue aussi un rôle crucial dans l’adoption des nouvelles règles ou les désignations d’arbitres.
« Il faut pouvoir faire entendre notre voix quand on n’est pas d’accord, comme au sujet du fameux carton rouge de 20 minutes, relève Clotilde Delbos. Il s’agit aussi de faire contrepoids à une approche extrêmement mercantile comme l’était la vente à CVC [le fonds d’investissement est entré dans le capital du Tournoi des VI Nations en 2021]. Pour cela, il faut que les Français et leurs soutiens soient plus présents au niveau international. »
Et même qu’un Tricolore prenne le gouvernail du rugby mondial, lequel vogue vers une direction qui n’est pas du goût de la FFR, comme le détaille Jean-Marc Lhermet.
Opération « transparence »
« Aujourd’hui, il y a une forme d’approche business et financière qui ne nous plaît pas, lance le vice-président délégué au haut niveau. Vouloir investir 200 millions d’euros dans le rugby américain, c’est quand même une somme très importante dont on pense qu’elle serait mieux orientée en soutenant le développement des nations du Tier 1 [les équipes des VI Nations au nord et du Rugby Championship au sud] et du Tier 2 [Canada, États-Unis, Fidji, Japon, Roumanie, Samoa et Tonga], qui sont en grandes difficultés. »
Certes, les Etats-Unis accueilleront les Coupes du monde de rugby masculin en 2031 et féminin en 2031, mais pour Lhermet, il n’est pas pertinent « d’aller sur des continents où d’autres sont déjà allés et se sont épuisés, et où on est une goutte d’eau dans l’océan. » Et ce n’est pas tout : « On a aussi la volonté d’être beaucoup plus clair dans la manière dont World Rugby est géré, beaucoup plus transparent et c’est pour cela que nous proposons la candidature d’Abdelatif Benazzi. »