« Hippocrate » : Une saison 3 qui ausculte « les traces de la crise du Covid-19 »
Après plus de trois ans d’attente, la saison 3 de la série médicale Hippocrate va faire son grand retour ce lundi sur Canal+ ! La saison 2 avait été en partie écrite et tournée en pleine pandémie. Le confinement était arrivé, et Thomas Lilti, le créateur de la série, avait renfilé pour quelques semaines sa blouse de médecin, sa formation initiale avant de devenir scénariste et réalisateur.
Souvenez-vous : dans les dernières minutes de la saison 2, on quittait l’équipe de soignants de l’Hôpital Raymond-Poincaré au début de la crise sanitaire, au lendemain de l’annonce du premier confinement par le président de la République. Au début de cette saison 3, nous retrouvons Chloé (Louise Bourgoin), Arben (Karim Leklou), Alyson (Alice Belaïdi), Hugo (Zacharie Chasseriaud) et Olivier Brun (Bouli Lanners) au lendemain de la pandémie. Pourquoi Thomas Lilti a-t-il décidé d’escamoter la crise sanitaire du Covid-19 ? Explications.
« Je savais que j’allais mettre un peu de temps à écrire cette nouvelle saison. Quand j’ai commencé à écrire la saison 3, la crise sanitaire n’était pas tout à fait derrière nous, mais j’avais le sentiment que lorsqu’elle sortirait, elle le serait. Hippocrate a toujours eu cette prétention d’essayer de raconter ce qui va advenir, d’anticiper un peu les choses plutôt que de regarder dans le rétroviseur », explique Thomas Lilti à 20 Minutes.
« De grandes difficultés d’accès aux soins »
Cette saison 3 débute donc l’été, au lendemain de la pandémie de Covid-19. Sur décision des autorités sanitaires, de nombreux services hospitaliers ont été fermés et ceux qui restent ouverts sont surchargés. « L’été, avec tous ces lits qui ferment et ces services qui se mettent en demi-régime d’activité, cela crée de grandes difficultés d’accès aux soins. Et les premières populations qui trinquent, c’est quand même, comme toujours, les populations défavorisées », commente Thomas Lilti.
En intervention pour SOS Médecins, Alyson se retrouve dans l’appartement d’un gang mafieux de l’Est où la tension monte. Un homme est entre la vie et la mort, après avoir attendu en vain l’arrivée du Samu. Alors qu’elle se démène pour sauver son patient, elle est malmenée physiquement par ses proches. À la suite de son agression, SOS médecin se met en grève, accentuant la difficulté d’accès aux soins de la population.
Dernier endroit où se rabattre pour se faire soigner ? Le service des urgences où Chloé, Arben et Brun tentent de faire face. Les patients affluent et les tensions sont palpables. « Une violence sociétale apparaît dans Hippocrate. Dans le premier épisode autour d’Alysson et l’épisode 2 où une bagarre éclate dans les couloirs parce que la directrice annonce que les urgences sont fermées. Ce sont des colères de frustration », commente le créateur de la série.
« Les soignants sont fatigués »
Cette nouvelle saison n’aborde de front la crise sanitaire, mais ausculte les conséquences du Covid-19 sur le système hospitalier français. « La saison 2 racontait l’état de l’hôpital juste avant la crise. Je trouvais plus intéressant de me demander à quoi ressemble aujourd’hui cet hôpital ? Dans quel état sont les soignants et les malades une fois la crise terminée ? », défend le créateur d’Hippocrate.
« On a vécu un drame… Les soignants sont fatigués parce qu’on est fatigué. Vous êtes fatigués, je suis fatigué », lance Olivier Brun, le chef des urgences (Bouli Lanners, toujours impeccable) à ses équipes. « Finalement, dans cette saison 3, il est omniprésent le Covid, mais en hors-champ, avec les traces qu’il a laissées sur la psychologie des soignants, sur leur terreur de devoir soigner dans ces conditions et la peur que cela revienne », commente le créateur d’Hippocrate.
« La pandémie a laissé les traces »
Le Covid a bien laissé un champ de ruines : « Alors même que les soignants, on les a applaudis et soutenus pendant cette crise, on se rend compte que la pandémie a laissé les traces », estime Thomas Lilti.
À l’hôpital Poincaré, les soignants se rendent vite compte que les consignes ne sont pas tenables et certains décident de désobéir. « Qu’est-ce qui se passe quand l’institution, le système, les lois qui nous régissent, nous donne le sentiment de nous empêcher de bien faire les choses ? Est-ce qu’il faut rentrer en résistance ? Désobéir ? Devenir hors-la-loi au risque de se mettre soi-même en danger ? C’est le dilemme auquel sont confrontés nos héros », explique Thomas Lilti.
« Le système de santé, c’est notre patrimoine à tous »
Ainsi, si le créateur a escamoté la crise sanitaire, c’est pour mieux en raconter les conséquences, délétères, sur notre système de santé. « Le système de santé, c’est notre patrimoine à tous. On y tient farouchement, et le voir s’abîmer, voir ceux qui y travaillent souffrir, on ne peut pas regarder cela avec un œil léger », conclut Thomas Lilti qui a le désir de « continuer de raconter ce système de santé qui ne cesse d’évoluer ».